Le régime syrien, soumis à des sanctions occidentales depuis dix ans, ne sera pas ébranlé par les nouvelles mesures punitives prises jeudi par Washington, et va jouer sur la fibre nationaliste face au «complot» de l'Occident, selon des experts.

Pour leur part, les opposants, qui affirment refuser l'aide de l'étranger, ont accusé les autorités de favoriser l'intervention étrangère en menant une répression qui révolte l'opinion publique internationale

«De telles mesures n'affecteront pas le régime», a affirmé à l'AFP Lahcen Achy, un spécialiste de la Syrie. Pour ce chercheur au Carnegie Middle East Center à Beyrouth, «Washington n'achète pas le pétrole syrien et les échanges commerciaux avec les États-Unis ne dépassent pas 3 à 4% du commerce extérieur de la Syrie».

Depuis 2004, Washington a imposé une série de sanctions économiques contre la Syrie accusée tour à tour «de soutenir le terrorisme», de chercher à  déstabiliser le Liban et l'Irak et de mener un programme de fabrication d'armes de destruction massive.

«Ce qui est annoncé est plus spectaculaire que significatif car les avoirs de l'État syrien aux États-Unis sont quasiment inexistants et 95% du pétrole exporté est destiné à l'Europe», a confirmé à l'AFP Jihad Yazigi, rédacteur en chef de la lettre économique The Syria Report.

Le président américain Barack Obama et ses alliés occidentaux ont pour la première fois jeudi appelé le président syrien Bachar al-Assad à partir et renforcé les sanctions contre son régime après cinq mois d'une brutale et sanglante répression de la contestation en Syrie.

Aussitôt Damas a réagi en jouant sur la fibre nationaliste. «Il est très important de se rappeler que le choix du président de la République est une décision du peuple syrien et du peuple syrien seulement», a déclaré Reem Haddad, directrice des relations extérieures du ministère de l'Information.

«C'est tout de même étrange qu'au lieu d'offrir son aide (à Damas) pour appliquer son programme de réformes, Obama et le monde occidental cherchent à attiser la violence en Syrie», a-t-elle ajouté.

«La Syrie ne fera pas fi de sa dignité et de sa souveraineté et l'Occident a oublié que le peuple syrien fait front face aux pressions extérieures», a martelé la télévision syrienne.

Par ailleurs, Damas compte sur ses alliés russe et chinois au Conseil de sécurité, qui se réunit jeudi, pour empêcher l'ouverture d'une enquête par la Cour pénale internationale pour des «crimes contre l'humanité».

Même l'opposition a cherché à se démarquer des décisions occidentales. «C'est le peuple syrien qui décide du départ du président. L'unique solution après l'effusion de sang dans les rues syriennes c'est de réaliser un vrai changement démocratique et pour y arriver nous comptons sur le peuple syrien et non pas sur l'étranger», a affirmé Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Interrogé sur le gel des avoirs de l'État syrien, il a répondu «si ces  décisions touchent aux intérêts du peuple syrien, elles sont refusées catégoriquement, sinon nous n'avons pas de commentaires à faire».

Pour l'avocat Hassan Abdel Azim, coordonnateur du Comité national pour le changement démocratique représentant l'opposition à l'étranger comme à l'intérieur de la Syrie «la poursuite de la violence par le régime a conduit à une ingérence régionale et internationale pour stopper l'agression contre le peuple».

«Nous demandons au pouvoir de répondre aux demandes du peuple et d'arrêter la violence pour ne pas ouvrir le chemin à une intervention étrangère», a-t-il ajouté.