Un tribunal de Bahreïn a condamné dimanche à des peines allant jusqu'à 15 ans de prison 50 militants chiites qui dirigeaient selon les autorités la contestation contre la monarchie sunnite du royaume, en collusion avec un pays étranger, qui serait l'Iran.

Ces militants étaient jugés pour avoir formé et animé le «Collectif du 14 février» qui organisait sur les réseaux sociaux la contestation contre la monarchie dans ce petit État du Golfe. Ils ont notamment été reconnus coupables d'avoir «eu recours au terrorisme» et «d'intelligence avec un État étranger», selon une source judiciaire.

Un dignitaire religieux chiite irakien, Sayed Hadi Modarressi, résidant actuellement à Kerbala (Irak) et qui a longtemps vécu à Bahreïn, a été condamné par contumace à 15 ans de prison. Il est accusé d'être le chef spirituel du «Collectif du 14 février», dont les autorités avaient annoncé le démantèlement en juin.

L'un des chefs du groupe, Saïd al-Chihabi, qui vit à Londres, a également été condamné à 15 ans de prison. Il avait été déjà condamné à la prison à perpétuité pour son rôle dans la contestation.

Au total, 16 personnes ont été condamnées à 15 ans de prison, quatre à dix ans, et les 30 autres à cinq ans de détention.

Parmi ces dernières figure une femme arrêtée en avril sur le circuit de Sakhir près de Manama pendant le Grand prix de F1, a-t-on ajouté de même source.

Le collectif du 14 février a joué un rôle de premier plan dans la contestation contre la monarchie sunnite des Al-Khalifa depuis le soulèvement du 14 février 2011 maté dans le sang un mois plus tard.

En annonçant en juin le démantèlement du groupe, les autorités avaient accusé ses dirigeants d'être à la solde de l'Iran et d'être responsables de violences dans le royaume.

Le procès survient sur fond de tension à Bahreïn où des chiites ont encore manifesté vendredi près de Manama, pour protester notamment contre l'arrestation d'un dirigeant du principal groupe de l'opposition, la formation chiite Al-Wefaq. Khalil Marzouk est détenu sous l'accusation d'«incitation au terrorisme».

Confronté à la persistance de la contestation chiite, le pouvoir a alourdi cet été les peines pour les auteurs de violences et introduit la peine de mort ou la prison à perpétuité en cas de morts ou de blessés.

La tension confessionnelle au Moyen-Orient a été attisée par le conflit syrien et une détérioration des relations entre les monarchies sunnites du Golfe et l'Iran qu'elles soupçonnent d'alimenter la tension au sein de leurs communautés chiites.

Bahreïn, situé stratégiquement dans le Golfe face à l'Iran, abrite le quartier général de la Ve flotte américaine.

Ce petit royaume, la seule monarchie du Golfe où la majorité de la population autochtone est chiite, avait interdit fin mai aux mouvements politiques d'avoir des contacts avec le Hezbollah chiite libanais.

Treize dirigeants de l'opposition, détenus depuis 2011 pour complot contre l'État, purgent de lourdes peines de prison, allant jusqu'à la perpétuité. Ces peines ont été confirmées en janvier par la Cour de cassation, dernier recours juridique.

Un dialogue national entre le pouvoir et l'opposition peine à progresser depuis son lancement le 10 février avec l'ambition de sortir Bahreïn de l'impasse politique.

Mais l'opposition, qui réclame une monarchie constitutionnelle, a continué à mobiliser dans la rue tout en dialoguant.

Selon la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), 89 personnes ont été tuées à Bahreïn depuis le début de la contestation.