Les forces de sécurité syriennes ont procédé lundi à près de 180 nouvelles arrestations au nord de Damas et donné 15 jours pour se rendre aux auteurs d'«infractions» alors que les opposants ont appelé à des manifestations en solidarité avec la ville assiégée de Deraa.

Alors que le mouvement de contestation inédit contre le régime de Bachar el-Assad garde sa vigueur près de deux mois après son début, le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a estimé que ce régime allait «tomber» s'il persévérait dans sa répression des manifestations.

Selon le site d'opposition «Syrian Revolution 2011», les forces de sécurité ont pénétré à l'aube dans la localité de Kafar Nubbol, à 320 km au nord de Damas, perquisitionnant les maisons et arrêtant 26 personnes.

Elle ont également fait irruption à l'aube à Zabadani et Madaya, deux stations d'estivage situées à une quarantaine km au nord-ouest de la capitale, et y ont effectué des perquisitions et arrêté 147 personnes, selon l'organisation des droits de l'homme Insan.

«Les personnes interpellées ont été frappées et insultées devant leur famille et des téléphones portables et des ordinateurs ont été saisis», ajoute cette organisation.

La veille, l'armée et les forces de sécurité avaient procédé à plus de 365 arrestations notamment dans la ville de Deraa, épicentre de la contestation dans le Sud, et dans celles de Douma (près de Damas), Lattaquié (nord-ouest) et Qamishli (nord-est), selon des militants des droits de l'Homme.

Un porte-parole militaire, cité par les médias officiels, a fait état de l'arrestation de «499 membres de groupes terroristes à Deraa», de la mort de «deux militaires et membres des forces de sécurité ainsi que de dix terroristes» et de l'arrestation de cinq tireurs embusqués.

Depuis le début de la contestation, le régime accuse des «gangs criminels armés» ou des «groupes terroristes» d'être à l'origine des violences.

Dans ce contexte, le ministère de l'Intérieur a demandé «aux citoyens qui ont participé ou commis des infractions à la loi comme le port d'armes, l'atteinte à la sécurité ou la propagation d'informations trompeuses de se rendre d'ici le 15 mai et de remettre leurs armes aux autorités compétentes».

Il demande aussi de «fournir des informations concernant les saboteurs, les terroristes et les caches d'armes», affirmant que dans ce cas «ils seront épargnés de toute sanction et ne seront pas poursuivis».

Dans le même temps, le site «Syrian Revolution 2011» a appelé à une mobilisation dans tout le pays chaque jour à midi en solidarité avec Deraa et toutes les «villes assiégées». «Nous disons à ce régime que le tribunal du peuple le jugera», écrit-il.

Sous le slogan «la semaine de la levée du siège», d'autres opposants et militants du site «Jeunes de la révolution syrienne 2011» ont annoncé de nouvelles manifestations lundi dans les environs de Damas, en solidarité notamment avec la ville de Deraa, à 100 km au sud de Damas.

Ils ont également appelé à des mobilisations mardi à Banias et Jeblah (nord-ouest), et mercredi à Homs, Talbisseh (centre) et Tal Kalakh, à la frontière avec le Liban. Jeudi, les contestataires entendent organiser des «sit-in nocturnes» dans toutes les villes.

Deraa est assiégée depuis une semaine après l'intervention de l'armée appuyée par des chars et des blindés dans la ville pour mater le mouvement de contestation lancé le 15 mars.

L'agence officielle Sana a annoncé que 600 tonnes de farine avait été acheminées vers cette région, alors que les organisations de droits de l'homme font état de «manque de nourriture et de médicaments et de lait pour les enfants».

Selon Wissam Tarif, directeur d'Insan, «il y a eu 2130 arrestations vérifiées depuis le 15 mars mais ce chiffre pourrait dépasser les 5000».

Trois Egyptiens, sept Libanais, trois Européens et un Algérien, en majorité des journaliste entrés sans autorisation de travail, sont aussi détenus, d'après cette organisation.

«Si le régime syrien persévère dans cette voie (de la répression), il tombera un jour ou l'autre, mais il tombera», a déclaré M. Juppé. «Aujourd'hui il y a cette grande aspiration à la liberté et à la démocratie. Il faut en tenir compte et la réprimer en tirant à balles réelles sur des foules est inacceptable quel que soit le pays qui se livre à cet exercice».