L'accusé des attentats de Boston Djokhar Tsarnaev a pour la première fois montré lundi un peu d'émotion à son procès, face aux larmes d'une tante spécialement venue de Russie, qui, trop bouleversée, n'a pas pu témoigner.

Djokhar Tsarnaev, 21 ans, qui risque la peine de mort pour les attentats du marathon en 2013, a pris un mouchoir en papier, s'est brièvement essuyé les yeux alors que sa tante Patimat Suleimanova, 64 ans, en pleurs, essayait de témoigner, en le regardant, assis à quelques mètres.

Elle a été escortée à l'extérieur quelques minutes plus tard. Elle n'avait pu dire que son nom, son âge et son lieu de naissance.

La journée a été largement consacrée aux témoignages de quatre autres femmes de sa famille, arrivées de Russie il y a une dizaine de jours et hébergées dans un lieu tenu secret.

Deux cousines nées au Daguestan ont ainsi raconté un petit garçon «très gentil» qu'elles voyaient régulièrement quand il habitait en Russie, même si ses parents déménageaient souvent. Elles ont aussi raconté leur surprise, quand sa mère Zubeidat s'était radicalisée en 2010.

Raisat Suleimanova, 35 ans, infirmière vivant près de Moscou, n'avait jamais auparavant quitté la Russie.

Mais elle a expliqué que Djokhar Tsarnaev était son «frère», et qu'elle l'aimait beaucoup. «Je ne pouvais pas ne pas venir ici», a-t-elle dit en russe, traduite par une interprète.

«Il était très gentil. Sa gentillesse rendait tout le monde gentil», a-t-elle déclaré, racontant un petit garçon qui pleurait à la mort de Mufasa en regardant «Le roi Lion», quand il avait quatre ou cinq ans.

Elle a aussi expliqué son enfance nomade, le couple Tsarnaev, qui s'était connu en Sibérie, déménageant ensuite au Kirghizistan, en Tchétchénie, au Daguestan, les enfants changeant chaque fois d'école et d'amis.

Chaque année, les Tsarnaev venaient passer de 3 à 6 mois chez ses parents, à Kaspiisk, au bord de la mer Caspienne, a-t-elle aussi raconté. Une douzaine de membres de la famille partageaient alors un appartement de deux pièces.

À la demande de la défense, elle a également évoqué ses souvenirs de Zubeidat, la mère du jeune musulman d'origine tchétchène, reconnu coupable le 8 avril des attentats qui avaient fait 3 morts et 264 blessés le 15 avril 2013.

Conversion-choc

Avant de partir aux États-Unis, Zubeidat aimait la mode, les bijoux, a-t-elle raconté, alors que des photos de la mère de Tsarnaev, élégante et souriante, en manteau de fourrure ou en tenue moulante et lunettes noires, étaient montrées aux jurés.

Mais en 2010, quand elle la revoit, Zubeidat porte un hijab. «C'était un choc, vu la personne qu'elle était avant», a raconté sa nièce, ajoutant que la famille Tsarnaev était auparavant «éloignée» de la religion.

La soeur aînée de Raisat, Naida, caissière dans une station-service près de Moscou, a aussi raconté un petit Djokhar «mignon, très gentil», toujours souriant. Elle ne l'avait pas revu depuis l'an 2000 et était aussi très émue.

Il «aimait beaucoup son frère aîné», Tamerlan. «C'est la tradition dans notre famille de toujours écouter l'aîné... et de suivre son exemple», a-t-elle dit.

La défense accuse Tamerlan d'avoir été le cerveau des attentats. Il avait été tué quatre jours après, à 26 ans.

Naida a aussi raconté son malaise, après le changement d'apparence de Zubeidat Tsarnaeva, précisant que ce n'était pas la tradition des femmes de sa famille, et que pour elle, ces personnes devenaient souvent des «extrémistes islamistes».

L'avocat de la défense lui a aussi fait entendre des propos de Tamerlan Tsarnaev dans lequel il parlait de sa haine, par rapport au traitement des musulmans, et se disait pour la création d'un califat.

«Nos parents ne nous ont pas enseigné ces choses», a-t-elle dit doucement, via une interprète.

Deux autres tantes de Tsarnaev venues de Russie ont aussi témoigné lundi, suivies dans l'après-midi de deux amies de lycée de Tsarnaev.

La défense a commencé la semaine dernière la présentation de ses témoins, dans cette phase finale du procès qui doit permettre aux jurés de décider entre peine de mort et réclusion à perpétuité. Elle doit durer environ deux semaines.