La défense a cherché lundi à minimiser le rôle de Djokhar Tsarnaev dans la préparation des attentats de Boston, en présentant ses premiers témoins, après que l'accusation eut terminé sa présentation par des photos insoutenables qui ont ému aux larmes plusieurs jurés.

Djokhar Tsarnaev, 21 ans, jeune musulman d'origine tchétchène, est jugé depuis le 4 mars au tribunal fédéral de Boston (nord-est des États-Unis). Semblant indifférent à ce qui se passe dans la salle d'audience, il risque la peine de mort pour ces attentats, les plus graves depuis le 11-Septembre aux États-Unis.

Ils avaient fait 3 morts et 264 blessés lorsque deux bombes artisanales avaient explosé près de la ligne d'arrivée du célèbre marathon de Boston le 15 avril 2013.

Après quatre semaines de présentation, l'accusation a fait témoigner lundi son 92e et dernier témoin, le médecin légiste Henry Nields. Il a raconté comment la plus jeune victime, Martin Richard, 8 ans, avait été éventré, le foie mis à nu, brûlé, certains os brisés, par la bombe déposée près de lui par Djokhar Tsarnaev. Les parents du petit garçon, Denise et Bill, étaient présents dans la salle du tribunal où l'émotion était vive.

«Il avait huit ans», a rappelé le médecin légiste.

Les vêtements brûlés, déformés et maculés de sang du petit garçon d'1,34 m et 31 kilos ont été montrés aux jurés.

Des photos ont également été présentées, dont l'une montrant la famille Richard, alors heureuse, juste devant Djokhar Tsarnaev près de la ligne d'arrivée du marathon.

Auparavant, une autre médecin légiste, Katherine Lindstrom, avait raconté, photos à l'appui, comment Lingzi Lu, une jeune étudiante chinoise de 23 ans, était morte, vidée de son sang sur le trottoir en quelques minutes.

Dès le début du procès, vu la quantité d'éléments à charge fournis notamment par les caméras de surveillance, la défense avait reconnu l'implication de Tsarnaev dans les attentats.

Sous la coupe de son frère

Mais déterminée à lui éviter la peine de mort, elle a avancé que le jeune étudiant, qui avait obtenu la citoyenneté américaine quelques mois plus tôt et paraissait bien intégré, était sous la coupe de son frère aîné Tamerlan, 26 ans.

«C'était Tamerlan Tsarnaev qui s'était auto-radicalisé. C'était Djokhar qui suivait», avait dit son avocate Judy Clarke.

Lundi, la défense a essayé avec ses premiers témoins de montrer que Djokhar Tsarnaev n'était pas impliqué dans les achats préparant les attentats.

Elle a fait témoigner brièvement une photographe du FBI, puis un expert en informatique et réseaux sociaux, Gerry Grant.

Ce dernier a expliqué que lorsque des cocottes-minute (qui serviront à faire les bombes) avaient été achetées en janvier 2013 à Saugus, au nord de Boston, le téléphone portable de Djokhar Tsarnaev émettait depuis l'université du Massachusetts Dartmouth, à quelque 80 km au sud.

Et ce soir-là, a ajouté l'expert, Djokhar Tsarnaev a utilisé son badge d'étudiant pour diner sur le campus.

Quand ont été achetées des armes à air comprimé, dans le New Hampshire en mars 2013, le téléphone du jeune Tsarnaev se trouvait aussi sur le campus, a-t-il ajouté.

Mais le procureur Aloke Chakravarty a souligné que Djokhar Tsarnaev et son frère «s'étaient parlés pendant plus de quatre minutes» le jour de l'achat des cocottes-minute. Et l'expert a dû admettre qu'il ne savait pas si Tamerlan Tsarnaev avait fait les achats en question.

Le frère ainé est mort lors d'une confrontation armée avec la police trois jours après les attentats.

Lundi après-midi, les jurés ont aussi vu des tweets anodins de Djokhar Tsarnaev le jour du marathon en 2012, où il se dit «prêt à dormir 20 heures de suite», et hésite entre prendre son petit-déjeuner et retourner dormir.

En quatre semaines de témoignages, les procureurs ont à l'inverse dressé le portrait d'un jeune meurtrier de sang-froid, étudiant en échec au double visage, devenu un avide lecteur de contenus islamistes retrouvés dans son ordinateur.

Durant le procès, les jurés ont pu voir ce qu'il avait écrit à l'intérieur du bateau où il s'était caché avant son arrestation, en banlieue de Boston: «le gouvernement américain tue nos civils innocents. Je ne peux pas supporter de voir un tel mal rester impuni».

Si les jurés le reconnaissent coupable, comme c'est probable, une seconde phase du procès commencera alors. Les jurés devront ensuite décider à l'unanimité entre peine de mort et réclusion à perpétuité.

Lundi, les avocats de Tsarnaev, ont par ailleurs, demandé dans une motion écrite qu'il soit acquitté de toutes les charges retenues contre lui, affirmant que le gouvernement avait «échoué à introduire des preuves établissant les offenses au-delà d'un doute raisonnable».