Le ministre de l'Intérieur français, Brice Hortefeux, se trouve dans l'embarras après avoir été enregistré à son insu alors qu'il prononçait des paroles jugées racistes par nombre d'élus de gauche et d'associations militantes.

L'affaire a éclaté jeudi lorsque le journal Le Monde a diffusé en ligne une vidéo tournée le week-end dernier au cours d'un rassemblement partisan. Elle avait déjà été visionnée hier près de 600 000 fois sur le site de partage Dailymotion.

 

Le politicien, qui a mené d'une main de fer le ministère de l'Immigration avant d'être nommé à l'Intérieur, tient ses propos controversés alors qu'il pose avec un partisan beur, Amine Benalia-Brouch.

Une femme dans la foule lui lance en riant que le jeune homme, né en France d'un père algérien et d'une mère portugaise, « mange du cochon « et « boit de la bière «.

« Il ne correspond pas du tout au prototype. Non, ce n'est pas du tout ça... Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes «, lance le ministre.

Ces propos ont été largement interprétés comme une référence aux Arabes, ce que dément le principal intéressé.

Le ministre affirme qu'il n'a jamais voulu faire de « référence à une origine ethnique, maghrébine, arabe, africaine et ainsi de suite «, mais parlait plutôt des Auvergnats en évoquant la région dont il est lui-même originaire.

Le Monde, loin de partager son point de vue, a affirmé hier dans un article analysant les propos de M. Hortefeux que son démenti ne tenait pas la route.

Plusieurs ténors de la gauche sont montés au front, demandant le renvoi du ministre, un scénario improbable dans la mesure où il s'agit de l'un des plus proches collaborateurs du président Nicolas Sarkozy.

» Xénophobe «

« La question n'est même pas de savoir s'il faut ou pas qu'il démissionne du gouvernement, mais que fait-il encore au gouvernement à cette heure-ci ? « a demandé le porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon.

L'ancien ministre à l'Égalité des chances, Azouz Begag, qui a déjà croisé le fer par le passé avec Brice Hortefeux, a dénoncé les propos du ministre comme « un vrai bon dérapage franchouillard raciste « venant d'un élu « qui mène une politique xénophobe «.

Tandis que l'Élysée est demeuré muet sur le sujet, les autres membres du gouvernement ont serré les rangs autour du ministre, parlant d'une « campagne de dénigrement assez scandaleuse «.

M. Benalia-Brouch s'est aussi porté à la défense du ministre hier en affichant sur YouTube une vidéo dans laquelle il donne sa version des faits. « On a juste parlé entre amis, sympathisants et militants de l'UMP (le parti au pouvoir)... Il n'y a eu aucun dérapage de M. Brice Hortefeux «, dit le jeune homme, qui se plaint d'être « harcelé « par les médias.

La controverse, justifiée ou non, ne pourrait pas plus mal tomber pour le ministre puisqu'il vient de mettre en retraite forcée un préfet soupçonné d'avoir proféré des propos racistes lors d'un contrôle de sécurité à l'aéroport d'Orly.

Le préfet en question, Paul Girot de Langlade, qui nie tout dérapage, aurait lancé : « On se croirait en Afrique ici « lors du contrôle, déplorant qu'il n'y avait « que des Noirs «. Il fait actuellement l'objet d'une enquête policière pour « injures publiques à caractère racial «.

Dans un communiqué confirmant sa mise à la retraite, M. Hortefeux a déclaré il y a quelques jours qu'il ne tolérerait « jamais que des propos racistes ou discriminatoires soient tenus dans notre pays, d'autant plus par un représentant de l'État «.

M. Girot de Langlade assure de son côté qu'il est victime d'un « plan de communication « du ministre, qui tente, selon lui, de se refaire une « virginité antiraciste «. « Le plus raciste des deux, ce n'est pas moi «, a-t-il lancé à la radio, visiblement ravi de la controverse.