Le Pakistan s'est doté vendredi d'un nouveau premier ministre, Raja Pervez Ashraf, un proche du président Zardari, sans dissiper les soupçons de corruption qui n'en finissent pas de peser sur le régime et avaient provoqué le départ du précédent chef du gouvernement.        

M. Ashraf, 61 ans, remplace Yousuf Raza Gilani, destitué dans la semaine par la Cour suprême, car il avait refusé de demander la réouverture de poursuites judiciaires contre le président Zardari.

Candidat du Parti du Peuple pakistanais (PPP) de M. Zardari, qui dirige la coalition gouvernementale, Raja Ashraf a été élu par l'Assemblée nationale avec 211 voix sur 342, a précisé la présidente de l'assemblée, Fehmida Mirza.

La nomination de ce proche de M. Zardari et ministre depuis 2008 ne devrait guère bouleverser l'équilibre politique d'un pays fragilisé par une grave crise énergétique, une corruption endémique et de violentes rébellions islamistes.

Elle est de plus teintée de controverse, le nouveau premier ministre étant accusé de corruption dans le cadre d'une affaire remontant à l'époque, après 2008, où il était ministre de l'Eau et de l'Électricité, et d'incompétence pour n'avoir rien fait pour résoudre la grave crise énergétique qui frappe le pays.

Le président Zardari, élu en 2008 après la fin du régime militaire, espère que cette nomination permettra à la coalition gouvernementale de tenir jusqu'à la fin de la législature et aux élections législatives prévues en février 2013.

M. Ashraf avait été désigné candidat du PPP dans la journée en remplacement de Makhdoom Shahabuddin, mis hors course la veille après qu'un tribunal ait opportunément lancé un mandat d'arrêt contre lui dans une affaire de corruption.

Une nouvelle péripétie engendrée par les rivalités entre le PPP, plombé par des accusations de corruption visant ses dirigeants, et la justice, soupçonnée d'être proche de l'opposition, voire de la puissante armée.

Jeudi, la justice avait lancé un mandat d'arrêt contre Makhdoom Shahabuddin, ministre sortant des Industries textiles, que le président Zardari venait de désigner candidat du pouvoir au poste de premier ministre, après d'intenses consultations au sein de son parti et de la coalition.

M. Shahabuddin est accusé d'être impliqué dans des importations illégales de drogue en 2010, quand il était ministre de la Santé. À ses côtés sur le banc des accusés dans cette affaire figure Ali Musa Gilani, fils de l'ancien premier ministre et contre lequel le tribunal a également délivré un mandat d'arrêt.

La justice avait déjà frappé un grand coup mardi en destituant Yousuf Raza Gilani, visant indirectement M. Zardari, très impopulaire et surnommé « Monsieur 10 % » en référence aux multiples soupçons de corruption qui pèsent sur lui.

M. Gilani, premier ministre de M. Zardari depuis 2008 (le plus endurant à ce poste dans l'histoire du Pakistan) a été poussé au départ, car il avait refusé de se plier aux demandes de la Cour suprême lui ordonnant de demander la réouverture de procédures judiciaires contre le chef de l'État pour des détournements présumés de fonds publics en compagnie de son épouse Benazir Bhutto quand elle était première ministre (1988-90 et 1993-96) et lui l'un de ses ministres.

Les soubresauts politiques du Pakistan sont suivis de près par les puissances occidentales, à commencer par les États-Unis, parce qu'il est la seule puissance militaire nucléaire du monde musulman, et l'un des sanctuaires de puissants réseaux islamistes, dont Al-Qaïda.