(Bogotá) Des milliers de manifestants ont protesté mardi à Bogota et dans les principales villes de Colombie contre les réformes annoncées et promises par le gouvernement de gauche du président Gustavo Petro.

Pour beaucoup vêtus de blanc et brandissant le drapeau tricolore national, les manifestants sont descendus dans les rues de Bogota, Medellín (nord-ouest), Cali (sud-ouest), et Barranquilla (nord) pour cette « marche de la majorité » convoquée par l’opposition de droite.

Au cri de « Dehors Petro ! », scandant des slogans hostiles au premier gouvernement de gauche de l’histoire du pays, les protestataires réunis dans le centre de la capitale se sont dirigés vers la place Bolivar, près de la présidence et du parlement. La mobilisation semblait particulièrement importante à Medellín, selon des images diffusées par les médias nationaux.

La police a estimé la participation à 92 000 personnes, dont 30 000 à Bogota.

Petro « a beaucoup improvisé et au lieu de vouloir améliorer ce qui marche, il veut supprimer tout ce qui existait », a dénoncé à l’AFP à Bogota Gloria Huertas, 59 ans. « Nous disons au président Petro de ne pas jouer avec notre santé, de ne pas jouer avec nos retraites, de ne pas détruire le pays », a asséné Nicolas de Francisco, 31 ans, autre manifestant dans la capitale.

« Ils vont détruire les pensions et les soins de santé. C’est un gouvernement aveugle, sourd et muet », a fustigé depuis Cali et devant la presse la sénatrice Maria Fernanda Cabal.

À Bogota, l’ex-ministre de la Défense du gouvernement conservateur sortant, Diego Molano, a dénoncé pêle-mêle « l’improvisation, l’affaiblissement des institutions, les menaces contre la presse », ou encore la hausse des violences dans le pays alors que « les guérillas se renforcent » depuis les négociations de paix engagées par le gouvernement, selon ce responsable.  

D’anciens responsables militaires et policiers aujourd’hui à la retraite avaient appelé à prendre part ces manifestations.

Au pouvoir depuis août 2022, M. Petro a été élu sur une promesse du « changement ». Il tente depuis lors de faire adopter et mettre en œuvre de nombreuses réformes entre autres sur le système de santé, le travail et les retraites, la redistribution des terres, les énergies propres. Il a également engagé des pourparlers avec les nombreux groupes armés opérant dans le pays.

Sa coalition gouvernementale avec les libéraux et les centristes s’est cependant effondrée, et il ne dispose plus actuellement de majorité pour faire adopter ses réformes au parlement, en particulier son emblématique réforme visant à ce que le service public reprenne le contrôle du système de santé.

Mardi, la réforme du travail (qui vise à réduire la journée de travail, à rendre obligatoire le paiement des heures supplémentaires et à durcir les conditions de licenciement), a échoué à franchir un premier examen à la chambre des députés, faute de quorum.

Le président est également confronté à un retentissant scandale d’écoute illégale concernant deux de ses proches – rappelant les vieilles pratiques crapuleuses de la politique traditionnelle colombienne – et ayant abouti à sa mise en cause pour financement illégal de sa campagne électorale pour la présidentielle. Il a dénoncé un « coup d’État larvé ».

Sa popularité est également en chute, selon le dernier sondage réalisé par l’institut de référence Invamer, passant de 50 % d’approbation en novembre à 34 % en mai.

Commentant lors d’une cérémonie publique les marches de ce jour, M. Petro a assuré que « notre principale responsabilité est de prendre soin d’eux. Par le passé, il n’en a pas été ainsi. Mais c’est désormais notre devoir et notre engagement », a-t-il plaidé.

Les manifestations se sont achevées sans incident notable.