(Addis Abeba) Les Nations unies ont déclaré avoir reçu des rapports « troublants » de violences sexuelles et d’abus dans la région éthiopienne du Tigré, où une opération militaire a été lancée en novembre par le gouvernement.  

Ces rapports mentionnent notamment des personnes forcées de violer des membres de leur famille et des femmes obligées d’avoir des relations sexuelles pour obtenir des « biens de première nécessité ».  

« Je suis très inquiète des graves accusations de violences sexuelles dans la région du Tigré en Éthiopie, notamment d’un grand nombre de viols présumés », dans la zone de Mekele, la capitale régionale, a déclaré jeudi soir dans un communiqué Pramila Patten, représentante spéciale de l’ONU chargée des violences sexuelles commises en période de conflit.  

« Les centres médicaux font face à une augmentation des demandes de contraceptifs d’urgence et de tests pour les maladies sexuellement transmissibles, ce qui constitue souvent des indicateurs de violences sexuelles lors de conflits », a-t-elle souligné, appelant à un accès humanitaire total au Tigré.

Cet appel concerne particulièrement « plus de 5000 réfugiés érythréens à Shire [une localité qui accueille des camps de réfugiés] et dans les environs, qui vivent dans des conditions extrêmes, beaucoup dormant selon certaines sources sans toit, sans eau ni nourriture ».  

Elle mentionne également les conditions de vie des plus de 59 000 Éthiopiens qui se sont réfugiés au Soudan voisin.  

Début janvier, la télévision d’État avait diffusé la vidéo d’une réunion au cours de laquelle un homme — non identifié — en uniforme militaire s’inquiétait de viols à Mekele, alors même que « la police fédérale et la police locale sont présentes ».

Un médecin basé à Mekele a déclaré à l’AFP début janvier que son établissement avait soigné 15 victimes de viol entre fin novembre et décembre, mais a souligné que « la plupart [des victimes] ne viennent pas à l’hôpital ».  

L’administration d’intérim au Tigré, n’était pas joignable dans l’immédiat pour commentaire.

Maladies

Le premier ministre Abiy Ahmed a lancé le 4 novembre une offensive militaire contre les autorités dissidentes du Tigré, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), avec qui les tensions étaient croissantes depuis des mois.

Prix Nobel de la paix 2019, M. Abiy a proclamé la victoire le 28 novembre, lors de la prise de Mekele. Mais certains leaders du TPLF ont fui dans cette région montagneuse et ont promis de continuer à se battre.

Aucun bilan précis n’est jusqu’ici disponible mais l’International Crisis Group (ICG) a évoqué « plusieurs milliers de morts ».  

En raison des combats dans la région, « de nombreux hôpitaux et cliniques ne fonctionnent que partiellement ou ont dû fermer » et « des personnels de santé ont été déplacés », a déclaré vendredi lors d’un point presse à Genève Ibrahima Socé Fall, directeur général adjoint de l’OMS pour les interventions d’urgence.

« Nous sommes inquiets de la possibilité que certaines maladies se diffusent dans cette région, parmi lesquelles le paludisme, la COVID-19, le choléra, la méningite et la fièvre jaune », a ajouté M. Fall, précisant que l’accès restait un problème « majeur ».