(Ismaïlia) L’Ever Given, navire chargé à bloc long de 400 mètres, a pu être dégagé du canal de Suez lundi, après y avoir empêché tout déplacement pendant six jours en raison d’une possible « erreur humaine ». Explications.

46 centimètres

C’est l’augmentation de la profondeur du canal attribuable à l’effet de la marée haute, qui s’est fait sentir de dimanche à lundi dans la portion sud du canal de Suez, là où était coincé depuis mardi dernier le navire Even Given. En plus de l’effet de la marée, des équipes de sauvetage ont retiré ces derniers jours plus de 30 000 mètres cubes de sable de la rive dans le but de dégager le navire. Treize bateaux et leur équipage ont participé à l’opération. Les navires environnants ont fait entendre leurs sirènes en guise de célébration lorsque l’Ever Given s’est mis à avancer.

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Des jeunes célèbrent devant le navire qui reprend sa route dans le canal de Suez, lundi.

Des centaines de navires bloqués

L’entreprise de navigation Hapag-Lloyd AG dit s’attendre à ce qu’il faille quatre jours pour faire passer les navires qui attendaient la réouverture du canal. Au moins 437 navires se sont entassés à chaque extrémité du canal en attendant de pouvoir passer depuis mardi dernier, quand le navire Ever Given, mastodonte long de 400 mètres et pesant 220 000 tonnes, s’est enlisé dans le sable boueux qui forme les rives du canal de Suez. « Même après la reprise de la navigation, il faudra encore plusieurs jours pour éliminer les bouchons formés de navires à chaque extrémité du canal, puis une semaine pour que les porte-conteneurs en direction de l’ouest atteignent les ports du nord de l’Europe », a signalé Greg Knowler, rédacteur européen principal du Journal of Commerce d’IHS Markit, selon Bloomberg.

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Une vue aérienne montre les navires qui étaient en attente dans le golfe de Suez, samedi dernier.

9 milliards de dollars

La fermeture forcée du canal de Suez a occasionné des pertes allant jusqu’à 9 milliards américains chaque jour. IKEA a dit avoir 110 conteneurs de produits à bord du navire Ever Given, tandis que l’entreprise d’équipement de construction Caterpillar s’attend à des retards d’une semaine pour la livraison de certains équipements en Europe. Les grossistes européens qui vendent du café sont aussi touchés, de même que le transport du pétrole. Onze bateaux transportant plus de 130 000 têtes de bétail ont été pris dans l’embouteillage. Devant l’impasse, certains bateaux ont décidé de contourner le continent africain et sont partis vers le cap de Bonne-Espérance, une route beaucoup plus longue et plus périlleuse que le passage du canal de Suez.

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Le navire Ever Given mesure 400 mètres de long et 59 mètres de large.

« Erreur humaine »

Les autorités égyptiennes ont d’abord dit que des « vents violents et une tempête de sable » étaient à l’origine de l’accident. Samedi, le lieutenant-général Osama Rabie, président de l’Autorité du canal de Suez (SCA), a ajouté que ces facteurs n’étaient pas les plus déterminants, et qu’une « erreur humaine ou technique » était sans doute responsable du problème. Bloomberg a en effet rapporté que le navire Ever Given se déplaçait à grande vitesse avant l’accident. « La dernière vitesse connue de l’Ever Given était de 13,5 nœuds, enregistrée 12 minutes avant qu’il ne s’échoue, selon Bloomberg, citant ses propres données. La vitesse maximale autorisée dans le canal se situe entre 7,6 nœuds et 8,6 nœuds », selon le rapport, qui ajoute que des pilotes sont parfois tentés d’aller plus vite pour mieux contrôler leur navire lors des tempêtes de vent.

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« La dernière vitesse connue de l’Ever Given était de 13,5 nœuds, enregistrée 12 minutes avant qu’il ne s’échoue », selon Bloomberg, citant ses propres données. « La vitesse maximale autorisée dans le canal se situe entre 7,6 nœuds et 8,6 nœuds. »

Pluie de poursuites

Le navire Ever Given sera sans doute à l’origine de « nombreuses poursuites » au cours des prochains mois, écrit dans une analyse la publication Law360. « Il y a potentiellement des centaines de millions de dollars en jeu en ce qui concerne la marchandise perdue, les coûts plus élevés en carburant, ou la perturbation des chaînes d’approvisionnement », note la publication. Le navire appartient à la firme japonaise Shoei Kisen KK, et est assuré par un assureur japonais, a affirmé la publication Marine Insight, selon qui l’évènement constitue « la plus grande catastrophe de porte-conteneurs au monde sans qu’un navire ne soit en panne ».