Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), chargé de juger les responsables du génocide de 1994, a rendu lundi son ultime verdict, réduisant en appel les peines de six accusés, dont l'ex-ministre rwandaise de la Famille, Pauline Nyiramasuhuko, seule femme jugée par le TPIR.

Les juges ont confirmé la culpabilité de Mme Nyiramasuhuko, 69 ans, incarcérée depuis juillet 1997 et condamnée à la perpétuité en première instance pour entente en vue de commettre le génocide, génocide, extermination et crime contre l'humanité, en l'espèce incitation à commettre des viols. Ils ont cependant réduit sa peine à 47 ans de prison.

La Chambre d'appel «réduit à 47 ans d'emprisonnement la peine de perpétuité prononcée contre Pauline Nyiramasuhuko», car «la violation de son droit à un procès dans un délai raisonnable lui a causé préjudice», ont indiqué les juges dans leur arrêt.

Les peines des cinq co-accusés de Mme Nyiramasuhuko ont été réduites pour les mêmes raisons, mais les juges d'appel ont confirmé l'essentiel des verdicts de culpabilité prononcée en première instance contre quatre d'entre eux.

La peine du fils de Pauline Nyiramasuhuko, Arsène Shalom Ntabobali, né en 1970 et condamné pour génocide, extermination et viols, passe elle aussi de la perpétuité à 47 ans, comme celle prononcée contre l'ex-maire de Muganza (sud), Elie Ndayambaje, condamné notamment pour génocide et «incitation directe et publique à commettre le génocide».

Les juges ont aussi réduit respectivement de 30 à 25 ans et de 25 à 18 ans les peines des anciens préfets de Butare (sud), Alphonse Nteziryayo et Sylvain Nsabimana. Ils ont ramené de 35 à 20 ans la peine de l'ancien maire de Ngoma (sud), Joseph Kanyabashi, l'acquittant des chefs de génocide et d'extermination, ne confirmant que sa condamnation pour «incitation».

Ils ont ordonné la libération immédiate de MM. Nsabimana et Kanyabashi, leur peine étant couverte par la durée de leur détention préventive.

La clôture le 22 avril du procès en appel de ces six co-accusés, dans une affaire très complexe, avait constitué l'ultime audience du TPIR.

Le prononcé de ce verdict d'appel lundi marque la fermeture officielle du tribunal, créé fin 1994 par le Conseil de sécurité de l'ONU pour juger les responsables des crimes commis cette année-là au Rwanda, principalement le génocide qui fit quelque 800 000 morts entre avril et juillet, essentiellement au sein de la minorité tutsi.

Outre qu'elle est la seule femme condamnée par le TPIR, Mme Nyiramasuhuko figure aussi parmi les rares accusés définitivement condamnés pour «entente en vue de commettre le génocide». Infraction prévue par la Convention de l'ONU sur le génocide, «l'entente» est distincte du génocide lui-même et n'implique pas que celui-ci ait effectivement été commis ou que ceux s'étant «entendus» y aient pris directement part.

Seule une poignée de condamnations pour entente ont été confirmées en appel - dont celles du premier ministre de 1994 Jean Kambanda, de son ministre de l'Information Eliézer Niyitegeka et d'un ancien maire et haut fonctionnaire, Jean-Baptiste Gatete, en plus de celle de Pauline Nyiramasuhuko - mettant en lumière la difficulté de prouver comment a été planifié le génocide.

Certains ont avancé que le peu de condamnations pour entente montraient que les massacres n'avaient pas été programmés. Mais des juristes ont argué que le mandat du TPIR, limité aux faits s'étant déroulés durant l'année 1994, rendait les preuves difficiles à apporter.