L'ex-général Muhammadu Buhari, qui portera les couleurs du principal parti d'opposition à la présidentielle de 2015 au Nigeria, avait déclaré une «guerre contre l'indiscipline» dans les années 1980, mais ses adversaires se souviennent de la chape de plomb imposée sous son régime militaire.

Le Congrès progressiste (APC), dont il est l'un des fondateurs, l'a choisi jeudi parmi quatre autres prétendants, dont l'ancien vice-président Atiku Abubakar. Il s'agira de sa quatrième candidature à la magistrature suprême depuis le retour de la démocratie au Nigeria, en 1999.

Ce général à la retraite, âgé de 71 ans, s'est forgé au fil des années une réputation d'incorruptible, un atout important dans cette puissance pétrolière, gangrenée par les détournements.

Cet homme élancé, toujours coiffé d'un petit chapeau bleu, qui a les dents du bonheur, a promis de rétablir l'ordre, s'il est élu à la tête de la nation la plus peuplée d'Afrique.

«La protection de la vie et de la propriété» des citoyens est au coeur des préoccupations de l'APC, les islamistes de Boko Haram, les gangs de bandits et les kidnappeurs ayant installé un climat de peur dans le pays, avait-il déclaré il y a quelques semaines en dévoilant son programme.

Ce musulman de l'ethnie fulani, originaire de Katsina, dans le Nord,  était déjà le principal rival de M. Jonathan, un chrétien du Sud, en 2011.

Sa défaite avait provoqué des violences postélectorales qui avaient fait près d'un millier de morts.

Arrivé à la tête du Nigeria le 31 décembre 1983 à la faveur d'un coup d'État, il a à son tour été renversé lors d'un putsch en août 1985.

«État policier»

La «guerre contre l'indiscipline» qu'il a menée pendant ses 20 mois au pouvoir visait à restaurer l'ordre public dans un pays souvent décrit comme chaotique.

Son régime a notamment été marqué par l'exécution publique de trois Nigérians condamnés pour trafic de drogue sur une plage en plein centre de Lagos, la capitale économique.

M. Buhari avait aussi fait arrêter Fela Kuti, le célèbre chanteur «afrobeat» et militant des droits civiques, mort en 1997, ainsi que des hommes politiques influents soupçonnés de corruption.

Le souvenir de son règne reste marqué par le cas d'un ancien ministre qui s'était évadé en Grande-Bretagne: le général l'avait fait droguer puis mettre dans un conteneur embarqué sur un navire à destination de Lagos. Les douanes britanniques avaient finalement empêché ce voyage.

L'écrivain nigérian Wole Soyinka, lauréat du prix Nobel de littérature, a dénoncé la «terreur» imposée par M. Buhari durant son régime, d'autres ont parlé d'un «État policier».

Pour le commentateur politique Ayo Banjoko, M. Buhari est «imprégné d'une sorte de zèle messianique. Il est rigide et intransigeant et il est convaincu que ce pays doit être purgé de ses maux, surtout la corruption».

En juillet 2014, M. Buhari a échappé à un attentat-suicide visant son convoi, à Kaduna (nord), qui avait fait 42 morts.

L'attaque n'avait pas été revendiquée, mais M. Buhari avait critiqué publiquement les islamistes de Boko Haram deux mois plus tôt, les traitant de «bigots sans cervelle se faisant passer pour des musulmans».

Certains experts ont toutefois soutenu que cet attentat avait pu être motivé par des querelles politiques.