Le conflit qui fait rage en République démocratique du Congo est, selon plusieurs, une répétition de celui qui a ravagé le Nord-Kivu en 2008-2009. Les deux guerres ont notamment en commun un des criminels de guerre les plus recherchés de la planète: Bosco Ntaganda. Son surnom? Le Terminator.

Le village de Kiwanji, dans le Nord-Kivu, n'oubliera jamais le nom de Bosco Ntaganda. En 2008, le rebelle et ses hommes ont tué 150 civils congolais, et ce, à moins de deux kilomètres d'une des bases des Casques bleus des Nations unies.

Tout en pleurant leurs morts, les survivants ont témoigné de sa brutalité auprès des journalistes et des organisations des droits de la personne. Ils ont affirmé que le chef rebelle, qui était alors un des commandants du Congrès national pour la défense du peuple, avait lui-même pris part au massacre. Qu'il était «l'homme qui tuait».

Ce même Bosco Ntaganda, surnommé le Terminator par les Congolais, était alors déjà recherché par la Cour pénale internationale (CPI), pour des crimes commis en 2002 et en 2003 dans la province de l'Ituri, un peu plus au nord.

Selon les allégations de la cour, qui a déposé deux mandats d'arrêt contre le rebelle en 2012, il y a recruté et entraîné des enfants soldats, en plus de participer à des massacres, des viols, de la torture, des meurtres.

Quelle n'a pas été la surprise des survivants de Kiwanji, quand, un an après le pire jour de leur vie, le même Bosco Ntaganda a été nommé général de l'armée congolaise. Sa promotion a eu lieu après que son organisation, composée principalement de combattants tutsis, a signé un traité de paix avec le Congo.

Général rebelle

En échange, le président du pays, Joseph Kabila, a promu le rebelle et lui a donné la responsabilité de Goma et le contrôle de milliers de soldats congolais. Et ce, malgré les appels répétés de la CPI à l'arrestation de celui qui a été membre d'une pléthore d'organisations rebelles, dont le Forum démocratique rwandais, du président rwandais Paul Kagame.

«C'était une situation complètement absurde, tout le monde savait ce qu'il avait fait. Et il se promenait à Goma complètement libre», déplore Carina Tertsakian, de l'organisation Human Rights Watch, qui mène une campagne pour faire connaître les atrocités commises par Bosco Ntaganda.

Le comble, rappelle-t-elle, c'est que le général Ntaganda a mené des opérations contre des rebelles hutus, issus du génocide rwandais, avec le soutien des forces de maintien de la paix des Nations unies. «On voit les conséquences de tout ça aujourd'hui!»

Au printemps cette année, Bosco Ntaganda a fait défection avec plus de 600 soldats qui lui étaient loyaux. Ces derniers sont devenus les rebelles du M23. Ils tirent leur nom du traité du 23 mars 2009 qui leur a permis de se joindre à l'armée.

Devenu discret

Le visage de l'organisation, qui a pris le contrôle de Goma cette semaine et continue son avancée, est le colonel Sultani Makenga, mais un récent rapport des Nations unies estime que Bosco Ntaganda est toujours à la tête d'une grande partie des opérations. Mais il prend soin de ne pas être trop visible afin d'éviter une arrestation.

«Pendant les années où il était général, il contrôlait toute l'industrie minière, très lucrative, de la région. Quand il a vu qu'il risquait de perdre le contrôle de tout ça et que le gouvernement congolais a demandé son arrestation, il a trouvé un autre moyen de reprendre le contrôle», estime Judith, travailleuse humanitaire québécoise, jointe hier à Bukavu et qui, pour des raisons de sécurité, a préféré ne pas révéler son nom entier.

Selon elle, le but du Terminator n'est pas de prendre le contrôle du pays entier, mais bien de faire main basse sur les mines de Walikale, à l'ouest de Goma. «Et comme toutes les fois précédentes, dénonce l'humanitaire, c'est la population civile qui y goûte.»