L'Assemblée constituante de Somalie a adopté hier une nouvelle constitution provisoire au terme de huit ans de travaux. Il s'agit d'une étape cruciale dans le processus visant à rétablir une autorité centrale dans ce pays de la Corne de l'Afrique, qui est sans gouvernement effectif depuis plus de 20 ans.

Q Que prévoit la constitution?

R La constitution prévoit l'instauration d'une République fédérale avec des lois «compatibles avec les principes généraux de la charia», la loi islamique. Du même souffle, elle garantit l'égalité de tous devant la loi, protège le droit à l'avortement en cas de danger pour la femme et interdit l'excision. Le document prévoit également le pluralisme politique et la présence de femmes dans toutes les institutions nationales. Enfin, la constitution fait du Somaliland, autoproclamé indépendant en 1991, une région à part entière de la Somalie.

Q Comment est-elle accueillie en Somalie?

R «La Constitution est extrêmement controversée en Somalie», répond Ej Hogendoorn, directeur de projet pour la Corne de l'Afrique au International Crisis Group. Si certains groupes la trouvent trop conservatrice, d'autres jugent qu'elle ne reflète pas assez les principes de la charia. «Des gens ont l'impression que la constitution leur a été imposée par la communauté internationale», explique M. Hogendoorn. La constitution a été adoptée par le gouvernement de transition somalien, soutenu par les pays occidentaux, bien qu'accusé de corruption. Les institutions de transition devaient adopter une constitution avant la fin de leur mandat de huit ans, qui prend fin ce 20 août.

Q Quel sera l'impact de la constitution?

R L'adoption de la constitution constitue l'une des dernières étapes du processus visant à rétablir une autorité centrale en Somalie. Le pays est sans gouvernement effectif depuis la chute du président Siad Barre, en 1991. «La constitution pourrait être un pas vers une plus grande stabilité politique, la première chose dont les gens ont besoin, estime Ej Hogendoorn. Une fois qu'ils auront acquis une stabilité politique, les Somaliens seront capables de cultiver leur nourriture et de vivre leur vie.» Selon M. Hogendoorn, c'est maintenant au tour de la classe politique d'utiliser la constitution à bon escient. La prochaine étape sera de nommer les membres du Parlement, qui éliront à leur tour un président.

Q À l'été 2011, des dizaines de milliers de Somaliens ont fui la sécheresse, la famine et la violence pour aller au camp de réfugiés de Dadaab, au Kenya. Un an plus tard, comment se porte le pays?

R «Grâce à la mobilisation internationale, la situation est mieux qu'elle ne l'était il y a un an, mais malheureusement, il y a eu une autre sécheresse, et les besoins en aide humanitaire sont croissants», répond Ej Hogendoorn. Sur le plan de la sécurité, par contre, le pays a fait «des gains impressionnants» depuis quelques années, dit-il. La mission régionale de maintien de la paix a fait plusieurs gains militaires dans sa bataille contre Al-Shabbaab, un groupe islamiste somalien en lutte contre le gouvernement de transition. Conséquence de leur recul sur le plan territorial, les insurgés d'Al-Shabbab ont multiplié les attentats terroristes dernièrement. Deux kamikazes ont d'ailleurs été abattus, hier, aux portes du lieu accueillant l'Assemblée constituante. L'attentat a blessé un garde de sécurité.

- Avec l'AFP et l'AP