Le Soudan du Sud a affirmé jeudi ne pas être «en état de guerre» ni «intéressé» par une guerre contre le Soudan, alors que Khartoum multiplie les déclarations hostiles contre le gouvernement de Juba.

«La République du Soudan du Sud n'est pas en état de guerre et n'est pas intéressée par une guerre avec le Soudan,» a affirmé le ministre sud-soudanais de l'Information, Barnaba Marial Benjamin, lors d'une conférence de presse. «La République du Soudan du Sud considère le Soudan comme une nation voisine et amie, pas comme un ennemi.»

«La République du Soudan du Sud est déterminée à (obtenir) une résolution pacifique de tous les problèmes encore en suspens,» a-t-il ajouté, mentionnant notamment le champ pétrolier de Heglig, que l'armée sud-soudanaise a pris la semaine dernière au Soudan et qui assurait, jusque-là, au moins la moitié de la production de brut du Nord.

Ces derniers jours, le président soudanais Omar el-Béchir a multiplié les menaces à l'encontre du Soudan du Sud, traitant notamment les dirigeants sud-soudanais «d'insectes» dont il compte «libérer les citoyens du Soudan du Sud».

Un langage dénoncé comme «génocidaire» par M. Benjamin.

Les tensions ont toujours été tendues entre Juba et Khartoum depuis que le Soudan du Sud a accédé à l'indépendance en juillet dernier.

Les deux parties s'opposent depuis des mois sur le tracé de leur frontière commune, le partage des ressources pétrolières du Soudan d'avant partition et s'accusent mutuellement de soutien à des groupes rebelles.

Mais depuis fin mars, les deux voisins se livrent à une escalade verbale et militaire le long de leur frontière commune, qui fait craindre à la communauté internationale une nouvelle guerre ouverte.

Béchir promet «une leçon par la force» aux Sud-Soudanais

Le président soudanais Omar el-Béchir a émis des doutes jeudi quant aux sanctions évoquées par l'ONU à l'encontre du Soudan du Sud, et promis que le Soudan punirait lui-même son voisin.

Le Soudan va donner au Soudan du Sud «une leçon par la force», a déclaré M. Béchir devant un rassemblement de miliciens, une déclaration dans la droite ligne de la rhétorique belliqueuse utilisée ces derniers jours, qui a soulevé les inquiétudes de la communauté internationale, ONU et Etats-Unis en tête.

«L'Amérique ne va pas leur imposer des sanctions, et le Conseil de sécurité non plus, mais le peuple soudanais va les punir», a lancé M. Béchir, en tenue militaire.

Mardi, le Conseil de sécurité de l'ONU a évoqué l'éventualité de sanctions contre le Soudan et le Soudan du Sud pour les convaincre de sortir de leur «logique de guerre», selon des diplomates.

Selon l'ambassadrice américaine Susan Rice, les 15 pays membres du Conseil ont de nouveau demandé que les troupes du Soudan du Sud se retirent de la zone frontalière pétrolifère de Heglig, qu'elles occupent depuis le 10 avril, et que le Soudan cesse ses bombardements aériens sur le Sud.

Les États-Unis se sont dits «préoccupés» mercredi après que le président Béchir a menacé de renverser le gouvernement de Soudan du Sud.

Avant les accords de paix de 2005, qui ont ouvert la voie à la partition du Soudan l'an dernier, le Nord et le Sud se sont livré une guerre civile meurtrière durant des décennies. La dernière vague du conflit, entre 1983 et 2005, a causé la mort de plus de 2 millions de personnes.

Les affrontements armés se sont intensifiés dans les régions frontalières des deux Soudans, essentiellement autour de Heglig, à partir de fin mars. Bombardements aériens soudanais et combats d'artilleries lourdes se sont notamment multipliés.

La prise de Heglig la semaine dernière a encore fait monter la pression.

Un journaliste de l'AFP qui s'est rendu dans la zone des combats y a vu des cadavres jonchant le sol ainsi que des carcasses de chars détruits.

Le porte-parole de l'armée sud-soudanaise, le colonel Philip Aguer, a affirmé que les troupes de Juba avaient repoussé ces dernières heures plusieurs attaques au sol sur un périmètre qui ne cesse de s'étendre.

M. Benjamin a de son côté affirmé que Khartoum avait envoyé un avion Antonov pour un survol jusqu'à la capitale Juba, à quelque 500 km au sud de la frontière commune. «Ils effectuent des vols de nuit ici,» a-t-il assuré.