Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a demandé vendredi un mandat d'arrêt contre le ministre soudanais de la Défense Abdelrahim Mohammad Hussein pour des crimes contre la population civile du Darfour qui continue, selon lui, d'être la cible d'attaques.

«Abdelrahim Mohammad Hussein était impliqué dans les crimes commis et c'est pourquoi nous avons demandé aux juges de l'ajouter parmi les responsables des crimes», a déclaré Luis Moreno-Ocampo dans un entretien téléphonique avec l'AFP.

Ministre de l'Intérieur du gouvernement du Soudan de 2001 à 2005 et représentant spécial du président Omar el-Béchir au Darfour de 2003 à 2004, M. Hussein a supervisé «une politique d'État» pour s'assurer de la «coordination des attaques contre les civils», a soutenu le procureur dans un communiqué.

Le «but» de la demande de mandat d'arrêt est d'«empêcher que les crimes continuent d'être commis», a expliqué à l'AFP M. Moreno-Ocampo, assurant qu'il soumettrait d'autres affaires aux juges «si les crimes ne cessaient pas».

Avec M. Hussein, six suspects, dont le président soudanais Omar el-Béchir et le chef de milice janjawid Ali Kosheib, sont actuellement poursuivis dans le cadre de l'enquête de la CPI sur le génocide au Darfour.

Le procureur de la CPI enquête depuis 2005 en vertu d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Darfour, région en proie depuis 2003 à une guerre civile qui a fait 300 000 morts et 2,7 millions de déplacés, d'après l'ONU. Khartoum parle de 10 000 morts.

Dans un communiqué, l'ONG Coalition pour la CPI dit espérer que l'émission, si elle se concrétise, d'un nouveau mandat d'arrêt dans le dossier du Darfour «augmentera la pression sur les responsables qui doivent répondre de crimes graves».

Subordonné de M. Hussein, l'ancien ministre soudanais des Affaires humanitaires et ex-secrétaire d'État à l'Intérieur Ahmed Haroun fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI depuis 2007.

«Aussi bien à travers M. Haroun que directement, M. Hussein a joué un rôle central dans la coordination des crimes, notamment dans le recrutement, la mobilisation, l'armement, l'entraînement et le déploiement de la milice janjawid», assure le procureur dans le communiqué.

«Les attaques suivaient le même schéma : les forces du gouvernement du Soudan encerclaient les villages, la force aérienne bombardait indistinctement, et les soldats, dont la milice janjawid, tuaient, violaient et pillaient le village tout entier, provoquant le déplacement de quatre millions d'habitants», selon l'accusation.

Le président soudanais ne reconnaît pas la compétence de la CPI qu'il défie en voyageant à l'étranger notamment dans des pays signataires du Statut de Rome, traité fondateur de la Cour, qui se sont engagés à coopérer avec cette dernière.

Il refuse de livrer à la CPI Ahmed Haroun et Ali Kosheib, qui font depuis 2007 l'objet de mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

Deux chefs rebelles du Darfour, Abdallah Banda et Saleh Jerbo, sont également poursuivis par la CPI, soupçonnés d'avoir mené une attaque en 2007 contre une mission de maintien de la paix au Darfour sur la base d'Haskanita (nord du Darfour) qui avait fait douze morts.

Ils sont libres en attendant l'ouverture de leur procès pour crimes de guerre.