Plusieurs centaines de jeunes militants de l'ANC ont brièvement affronté la police mardi à Johannesburg, dans une manifestation de soutien à leur leader Julius Malema, qui comparaissait devant la commission de discipline du parti pour insubordination.

Julius Malema, président de la Ligue de jeunesse de l'ANC, le parti au pouvoir, était convoqué pour «avoir porté atteinte à la réputation de l'ANC» et pour «avoir semé la division» dans le parti.

Il risque jusqu'à l'exclusion, notamment pour avoir exhorté à un changement de régime au Botswana voisin, traitant son gouvernement de «marionnette des Américains».

Depuis longtemps, ce tribun de 30 ans au verbe facile dérange le parti au pouvoir, en se faisant le champion de l'anti-impérialisme et de l'anticapitalisme. Il appelle entre autres à la nationalisation des mines et à l'expropriation sans compensation des fermiers blancs.

Mardi matin, des centaines de ses partisans regroupés devant le siège de l'ANC ont affronté à coups de pierres et de bouteilles les forces de l'ordre.

Les violences ont été fermement condamnées par plusieurs organisations, dont la Ligue de jeunesse elle-même. «La Ligue ne sera jamais associée aux éléments provocateurs, indisciplinés et aux agents provocateurs», indique un communiqué.

L'association des vétérans de la lutte anti-apartheid a pour sa part accusé les manifestants de «semer les germes de la guerre civile».

Toute la nuit, les jeunes avaient campé à proximité du siège de l'ANC, avant de se mettre en marche le matin vers ce bâtiment où se déroulaient les auditions. Stoppés par un cordon de police, ils ont commencé à défier les forces de l'ordre. Pour riposter aux lancers de pierres et de bouteilles, la police a fait usage de canons à eau, de gaz lacrymogènes et de tirs de balles en caoutchouc.

Malgré ces échauffourées, les auditions se sont déroulées comme prévu. «La procédure continue. Nous ne sommes pas intimidés», a déclaré devant des journalistes le secrétaire général de l'ANC Gwede Mantashe.

Pour ses partisans, Malema est simplement victime de son franc-parler, qui dérange les dignitaires du pouvoir.

«Malema a mis le doigt sur le sujet très délicat de la redistribution des richesses dans ce pays», explique Michael Siluma, 17 ans, qui avoue avoir séché ses cours pour venir soutenir son leader. «C'est pour cela qu'il est persécuté. Personne n'a le courage de traiter ce sujet, il n'y a que lui qui le fasse, et maintenant ils veulent le réduire au silence».

Le jeune leader entretient volontiers son image de rebelle. Il a déjà comparu devant la justice pour avoir remis à l'honneur dans ses réunions une chanson de l'époque de l'apartheid appelant à «tuer le Boer» (fermier blanc). Chanson reprise en choeur mardi matin par les jeunes, après les affrontements avec la police.

Il a qualifié aussi les Américains d'«impérialistes assoiffés de sang» après l'intervention de l'OTAN en Libye.

Mais tout récemment, son fastueux train de vie lui a valu d'abord la suspicion de la presse, avant que la justice n'ouvre une enquête, actuellement en cours, sur des soupçons de corruption dans des appels d'offres dont auraient bénéficié des sociétés auxquelles il est lié.

Il reste cependant l'idole politique de millions de jeunes noirs, touchés par un chômage massif (25% officiellement) et victimes d'inégalités économiques encore gigantesques 17 ans après la fin du régime raciste de l'apartheid.