Démarcation de la frontière, partage de la manne pétrolière, respect de la citoyenneté, accord sur l'avenir d'Abyei... le Nord et le Sud du Soudan ont moins de six mois pour boucler un ensemble de dossiers litigieux avant la proclamation de l'indépendance du Sud-Soudan.

Les premiers résultats partiels créditent la sécession de près de 99% des voix, et garantissent déjà la victoire de cette option, lors du référendum d'indépendance qui s'est déroulé du 9 au 15 janvier.

Les responsables sudistes invitent la population au calme, et pour cause. L'indépendance a été votée, les résultats doivent encore être officialisés, mais surtout la sécession n'est pas encore réalisée.

L'accord de paix ayant mis fin à plus de deux décennies de guerre entre le Nord, musulman et en grande partie arabe, et le Sud, afro-chrétien, du pays prévoyait une période intérimaire de six ans qui s'achèvera le 9 juillet.

Le Sud-Soudan sortira alors de la domination soudanaise. Mais d'ici juillet, le Nord et le Sud doivent s'entendre sur un très grand nombre de dossiers chauds. «C'est peut-être plus compliqué à négocier que l'accord de paix global», remarque un observateur de la scène soudanaise sous le couvert de l'anonymat.

Le parti du Congrès national (NCP) du président Omar el-Béchir et les ex-rebelles sudistes du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) ont commencé en juillet des négociations sur quatre enjeux «post-référendaires»: sécurité, citoyenneté, respect des accords internationaux et économie, ce qui inclus le partage de la dette et des revenus pétroliers. Mais aucun accord n'est intervenu jusqu'à présent.

Quelque 80% des réserves pétrolières du Soudan, estimées à plus de six milliards de barils, sont enfouies au Sud, région qui doit utiliser l'oléoduc traversant le nord du pays pour exporter son trésor noir. Les parties doivent trouver une formule de partage assurant aux deux régions des revenus pétroliers afin d'assurer la paix entre les ex-ennemis.

Avec des centaines de milliers de Sudistes vivant toujours dans le nord du pays, et un nombre inférieur de Nordistes au Sud, les deux parties doivent rapidement trouver un accord sur le statut de ces personnes si elles ne veulent pas accélérer les vagues de migration déjà commencées.

À ces sujets sensibles, s'ajoutent la démarcation de la frontière Nord-Sud, dont 20% demeure contestée, et la question d'Abyei, enclave située à la lisière du Nord et du Sud revendiquée à la fois par la tribu sudiste Dinka Ngok et par celle, nordiste, des Misseriya.

Un référendum sur le rattachement d'Abyei au Nord ou au Sud était prévu le 9 janvier, mais il a été repoussé sine die. Des combats ayant fait jusqu'à 60 morts depuis janvier ont rappelé le caractère explosif de cette zone.

«Abyei est jusqu'à présent la partie la plus difficile de l'accord de paix global (CPA) à mettre en oeuvre, plus difficile encore que la délimitation du reste de la frontière Nord-Sud ou le partage des revenus pétroliers», a écrit cette semaine le spécialiste du Sud-Soudan Douglas Johnson.

Selon lui, la seule façon de sortir de l'impasse est de tenir le référendum sur le rattachement de cette région et de garantir aux nomades arabes Misseriya les droits de pâturage même si Abyei est rattaché au Sud à l'issue d'une consultation.

Les pourparlers sur Abyei doivent reprendre le 27 janvier sous les auspices de l'ex-président sud-africain Thabo Mbeki. Ces discussions sont séparées de celles sur les quatre enjeux post-référendaires et des rencontres techniques sur la démarcation de la frontière.

Mais avec le temps qui presse, l'idée commence à germer d'un nouvel accord global Nord-Sud pour régler l'ensemble de ces points de friction et éviter un retour à la guerre.