Deux humanitaires allemands de l'organisation THW ont été enlevés tard mardi soir par des hommes armés inconnus dans leurs bureaux de Nyala, la métropole du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan où la sécurité ne cesse de se dégrader.

«Ils ont été enlevés tard mardi soir dans leurs bureaux à Nyala par des hommes armés habillés en civil», a dit à l'AFP Kemal Saïki, chef des communications de la mission de paix ONU-Union africaine au Darfour (Minuad).

Sept hommes -dont quatre armés de kalachnikov- ont commis le rapt vers 21H45 (14H45 HNE), a précisé un responsable des casques bleus. Contacté par l'AFP, un haut responsable de la Commission des affaires humanitaires du Darfour-Sud, a confirmé le rapt des deux Allemands.

«Un employé soudanais qui était présent a aussi été capturé, mais il a été relâché peu après par les ravisseurs», a ajouté M. Saïki. Le groupe de ravisseurs, dont l'identité n'est pas connue, se dirigeait vers Kass, (environ 60 km au nord de Nyala), ont indiqué des responsables de la mission de paix.

Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères allemand a confirmé que deux citoyens allemands étaient portés disparus depuis mardi au Darfour, sans autre détail.

L'organisation THW -Technisches Hilkswerk- n'est pas une ONG, mais une agence fédérale allemande dédiée au soutien technique dans les cas de crises humanitaires.

«Des deux employés, l'un était au Soudan depuis quelques semaines et l'autre depuis un an. L'enlèvement s'est produit alors que THW est sur le point de fermer ses opérations au Darfour-Sud», a dit un humanitaire à l'AFP, précisant que l'organisation avait encore des opérations dans le Darfour-Nord.

C'est la première fois que des Allemands sont enlevés au Darfour, région en proie à une vague d'enlèvements de travailleurs humanitaires et d'Occidentaux depuis l'émission, en mars 2009, d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) contre le président soudanais, Omar el-Béchir, pour crimes de guerre et contre l'Humanité.

Depuis, 17 étrangers dont dix Occidentaux ont été enlevés au Darfour. Ils ont tous été libérés sauf les deux employés de THW et une Américaine de l'ONG Samaritan's Purse kidnappée en mai. Des humanitaires avaient aussi été enlevés au Tchad et en Centrafrique, pays voisins, par des groupes du Darfour.

«Il y a une vraie dégradation de l'environnement sécuritaire au Darfour. La plupart des humanitaires n'ont même plus accès à certaines zones de la région», a dit à l'AFP un autre humanitaire sous le couvert de l'anonymat.

Cette vague d'enlèvements a modifié le modus operandi des organisations humanitaires. Certaines ont plié bagages, d'autres ont gelé des programmes d'aide, et les humanitaires se rendent moins souvent sur le terrain et pour de plus courtes périodes. «La communauté humanitaire réfléchit à l'avenir de ses activités au Darfour», a résumé ce responsable humanitaire.

Les casques bleus ont été victimes de deux rapts et ont été la cible de plusieurs attaques. Trois casques bleus rwandais ont été tués lundi par des hommes armés à Nertiti, au Darfour-Ouest. Les soldats de la paix ont répliqué et fait trois morts du côté des assaillants.

Le Darfour est le théâtre depuis 2003 d'une guerre civile complexe à l'origine de 300 000 morts selon les estimations de l'ONU -10 000 d'après Khartoum- et 2,7 millions de déplacés.

Au conflit entre mouvements rebelles et forces pro-gouvernementales s'est superposé des combats entre tribus arabes rivales et une montée en puissance du banditisme.

Les violences ont fait près de 600 morts au Darfour en mai, mois le plus meurtrier depuis le déploiement en 2008 des Casques bleus dans cette région de l'ouest du Soudan.