Quatre importants candidats opposés au président Omar el-Béchir se sont retirés jeudi de la course à la présidence, alors que l'émissaire américain pour le Soudan tentait de sauver la crédibilité du scrutin déjà miné par des critiques et la menace d'un boycott.

Sadek al-Mahdi, ancien premier ministre et chef du Parti Umma (nationaliste), Mubarak al-Fadil, chef d'une faction importante du Parti Umma, Ibrahim Nugud, leader du Parti communiste, et Hatem al-Sir, candidat du Parti Unioniste démocrate (DUP), se sont retirés de la course, à quelques jours de la présidentielle prévue le 11 avril, a dit M. Fadil.

La Umma et les Unionistes sont les deux piliers traditionnels de la politique soudanaise. Ils avaient respectivement terminé premier et deuxième lors du dernier scrutin multipartite de 1986, avant le coup d'État militaire de l'actuel président Omar el-Béchir en 1989.

L'opposition accuse de partialité la commission électorale et estime que le parti du président Béchir se prépare à bourrer les urnes. Les partis n'ont toutefois pas précisé jeudi s'ils participeraient aux élections législatives et aux régionales également prévues en avril.

Ces retraits, annoncés à l'issue d'une réunion de l'opposition, surviennent au lendemain de l'annonce du retrait de Yasser Arman, du Mouvement populaire de libération du Soudan (ex-rebelles sudistes) et principal rival du président Béchir, sous le coup d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et contre l'humanité au Darfour (ouest).

«Le retrait de la candidature de Yasser Arman assure la victoire d'Omar el-Béchir», a estimé à l'AFP Haydar Ibrahim, analyste soudanais de renom. 

Selon plusieurs observateurs, ce retrait a été l'objet d'un accord entre les ex-rebelles sudistes du SPLM et le parti de M. Béchir.

Le SPLM voulait se montrer solidaire des demandes de l'opposition, mais ne souhaitait pas ulcérer le président Béchir qui a menacé de rejeter le référendum clé sur la sécession du Sud-Soudan (janvier 2011), estiment plusieurs observateurs.

Le retrait de Yasser Arman, mais l'annonce d'une participation aux législatives et aux régionales, hormis au Darfour, permettait ainsi aux ex-rebelles de ménager la chèvre et le chou.

Ces retraits massifs surviennent alors que l'émissaire américain Scott Gration tentait de sauver la crédibilité des élections.

Mercredi, les États-Unis, la Grande-Bretagne et la Norvège ont exprimé leurs préoccupations concernant les élections au Soudan et appelé les différentes parties à oeuvrer pour mettre en place un scrutin «crédible».

M. Gration a rencontré un à un, jeudi matin des leaders de l'opposition, selon un journaliste de l'AFP sur place.

«Les Américains sont ici pour voir comment ils peuvent sauver le processus (électoral) parce qu'ils veulent une élection juste et plus crédible», a déclaré M. Fadil après avoir rencontré l'émissaire américain.

 Tous les candidats n'ont pas opté pour le boycott. «Notre parti va s'engager (dans le processus électoral) de la présidentielle (...) à tous les niveaux», a déclaré jeudi l'opposant islamiste Hassan al-Tourabi, ancien mentor du président Béchir devenu un de ses plus virulents critiques.

Et Abdelaziz Khaled, candidat d'une petite formation de gauche, a dit à l'AFP vouloir se maintenir dans la course. D'autres candidats dont Fatima Abdelmahmoud, première femme à briguer la présidence du Soudan, doivent encore prendre leur décision.

Les partis d'opposition devaient tenir une nouvelle réunion jeudi soir à Omdurman.