Deux employés civils des Casques bleus au Darfour ont été enlevés samedi par des hommes armés, le premier enlèvement à viser la mission de paix qui survient après des déclarations controversées sur la fin présumée de la guerre dans cette région de l'ouest du Soudan.

«Ce matin à 04H30 locales, des hommes armés ont attaqué une résidence du personnel de la Minuad à Zalingei, au Darfour. Ils ont enlevé deux membres civils de la mission, un homme et une femme», a déclaré à l'AFP Noureddine Mezni, le porte-parole de la mission. Il s'agit du premier enlèvement à viser la mission de paix ONU-Union africaine au Darfour (Minuad), déployée depuis janvier 2008, a précisé le responsable.

Le contact avec les ravisseurs a été établi samedi matin, a ajouté M. Mezni, sans préciser la nationalité des deux otages ni l'identité des malfaiteurs.

Trois enlèvements visant des travailleurs humanitaires étrangers ont eu lieu au Darfour depuis l'émission en mars d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) contre le président soudanais Omar el-Béchir, accusé de crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour.

Deux de ces enlèvements se sont soldés par la libération des otages. Dans le troisième cas, les otages -- deux employées de l'ONG irlandaise Goal -- sont toujours aux mains de leurs ravisseurs.

L'enlèvement des employés de la Minuad survient deux jours seulement après les déclarations controversées du chef des opérations militaires de la mission, le général nigérian Martin Luther Agwai.

«Aujourd'hui, je ne dirais pas qu'il y a une guerre au Darfour», avait déclaré M. Agwai, qui sera remplacé la semaine prochaine par le Rwandais Patrick Nyamvumba.

«C'est vraiment un conflit de basse intensité, la phase de la guerre à grande échelle est terminée», avait-il ajouté, faisant écho aux propos du chef de la mission, Rodolphe Adada. Celui-ci avait affirmé en avril au Conseil de sécurité que le Darfour était l'arène d'un conflit de «basse intensité».

Les propos du général Agwai ont été critiqués par la rébellion du Darfour, notamment le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), le plus militarisé des groupes rebelles, et le dirigeant rebelle Abdelwahid Mohammed Nour, chef d'une importante faction de l'Armée/Mouvement de libération du Soudan (SLA/M-Abdelwahid).

Le rapt des deux employés de la force de paix est survenu à Zalingei, ville natale de M. Nour, qui vit aujourd'hui en exil. Ce secteur, dans le Darfour-Ouest, est «sous contrôle» des forces soudanaises, mais compte aussi de nombreux partisans de M. Nour, a indiqué à l'AFP une source militaire.

«Cet enlèvement est un acte terroriste que je condamne fermement», a déclaré à l'AFP M. Nour. «Ce n'est pas dans le comportement de mon mouvement que de kidnapper des travailleurs humanitaires ou des membres de la Minuad», a-t-il ajouté, accusant le gouvernement d'être à l'origine de ce rapt.

Le conflit au Darfour a fait 300 000 morts depuis 2003 selon les estimations de l'ONU –10 000 d'après Khartoum-- et 2,7 millions de déplacés.

Par ailleurs, au moins 43 personnes sont mortes dans des affrontements entre des hommes armés et l'armée du Sud-Soudan qui intervenait dans un conflit tribal dans un secteur sensible du territoire semi-autonome, a indiqué samedi à l'AFP un porte-parole militaire. Les violences entre tribus sont monnaie courante au Sud-Soudan et l'ONU s'est récemment alarmé du fait que le nombre de morts y dépasse actuellement celui enregistré au Darfour.