Le Soudan a appelé hier à un cessez-le-feu au Darfour. Dans ce qui semble être sa plus sérieuse initiative de paix pour la région, il s'est engagé à désarmer ses milices, les Janjaweed, et il a invité les réfugiés et déplacés à retourner chez eux en leur promettant des indemnités pour les aider à refaire leur vie.

En six années de guerre dans ce vaste désert pétrolifère de l'ouest du Soudan, frontalier du Tchad, quelque 300 000 civils ont été tués et 2,5 millions d'autres ont été chassés de leurs foyers.

 

L'offre, qui n'est pas une déclaration unilatérale de cessez-le-feu, a été faite par le général-président Omar Al-Béchir devant le Forum national sur le Darfour, qui a réuni, à Khartoum, les partis politiques soudanais, des chefs tribaux du Darfour et des émissaires de l'ONU, de la Ligue arabe et de l'Union africaine.

Elle suit les recommandations d'un groupe spécial appelé «Initiative du peuple soudanais», qui a été boycottée par les rebelles du Darfour. Elle sera au centre d'une conférence de paix d'ici fin 2008 au Qatar, médiateur dans le conflit.

L'ONU et le Canada

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a salué l'offre de Khartoum, tout comme le Canada. Ban a fait part de ses «attentes élevées» que le Soudan et les rebelles feront «des progrès concrets» vers un accord de paix au Darfour.

Les rebelles ont aussitôt rejeté l'offre d'Al-Béchir. «On a besoin d'actes, et non de paroles», a dit Abdulwahid Elnur, chef en exil du Mouvement de libération du Soudan (SLM). «Il faut d'abord désarmer les Janjaweed», a-t-il ajouté.

«Ce gouvernement ne cherche pas sérieusement la paix, il prépare la guerre sur tous les fronts», a dit de son côté Suleiman Sandal, commandant de l'autre groupe rebelle, le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM). «Tout cessez-le-feu doit faire partie d'un accord-cadre», a-t-il ajouté.

Les rebelles et des critiques du régime lient l'offre du président soudanais à ses efforts pour éviter les accusations de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre portées à son encontre par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI).

Ses principaux alliés, la Ligue arabe et l'Union africaine ont demandé au CPI un délai d'un an avant de lancer des poursuites contre Al-Béchir, mais la demande doit venir du Conseil de sécurité de l'ONU.

La Chambre préliminaire de la CPI a demandé le mois dernier au procureur, Luis Moreno-Ocampo, des «éléments supplémentaires à l'appui de certains aspects de sa requête d'un mandat d'arrêt» contre Al-Béchir.

Outre les pressions qu'exerce sur lui le dossier de la CPI, Omar Al-Béchir a agi à la faveur d'un tournant crucial cette semaine: la normalisation diplomatique avec le Tchad voisin, accompagnée d'un échange de diplomates dimanche.

Cela promet de mettre fin à l'appui du Tchad aux rebelles soudanais du Darfour; en retour, le Soudan cesserait son soutien aux rebelles tchadiens opérant depuis le Darfour.