L'accord sur le partage du pouvoir au Zimbabwe est remis en cause, un mois après sa signature: n'ayant pu s'entendre avec son rival Morgan Tsvangirai sur l'attribution des portefeuilles, le président Robert Mugabe s'est octroyé samedi des ministères clés, provoquant la colère des capitales occidentales.

L'ex-président sud-africain Thabo Mbeki a repris hier sa médiation à Harare, tandis que les États-Unis accusaient Mugabe d'avoir violé l'accord, et l'Union européenne, qui s'apprêtait à reprendre son aide au Zimbabwe, menaçait de lui infliger de nouvelles sanctions.

 

Cela alors que des coopérants cités par le Times de Londres parlent de menace de famine dans le pays d'Afrique australe, où la Banque centrale a lancé un nouveau billet de 50 000$ ZIM (274$ CAN) et où l'inflation a atteint des sommets.

Mugabe, du parti ZANU-PF qui a combattu le régime minoritaire blanc de Ian Smith, et Tsvangirai, du Mouvement pour le changement démocratique (MCD), se sont réunis pendant plus de sept heures avec Mbeki dans un hôtel de Harare, et ils doivent reprendre leurs discussions aujourd'hui.

Poursuite des discussions

«Il n'y a pas de conclusion, nous continuerons demain», a dit Tsvangirai à la fin de la rencontre. «Nous reprendrons demain, cela signifie que nous avons couvert certains sujets», a déclaré Mugabe, sans préciser.

L'accord signé le 15 septembre dans le même hôtel prévoit que Mugabe reste chef de l'État et Tsvangirai devient premier ministre. Il prévoit aussi 31 ministres - 15 à la ZANU-PF, 13 au MDC, et trois à une faction dissidente de ce parti.

Face aux exigences de Tsvangirai quant à la composition du gouvernement, Mugabe a attribué samedi à son parti l'essentiel des ministères clés (Défense, Intérieur, Information et Affaires étrangères, Justice, Mines, Terres).

Selon une liste officielle, le MDC de Tsvangirai et sa faction dissidente se voient attribuer des ministères moindres, comme la gestion des Eaux et les Affaires constitutionnelles.

Tsvangirai a menacé dimanche de renoncer à former le gouvernement d'union si cette décision n'était pas annulée. Lundi, Mugabe a persisté en renouvelant les mandats de ses deux vice-présidents sortants.

Selon l'accord, Joyce Mujuru et Joseph Msika restent vice-présidents. Leurs postes n'étaient pas en cause. Mais le MDC a estimé qu'en allant de l'avant avec leur prestation de serment, Mugabe n'était pas «de bonne foi».

Huées et appels des élus

Le Parlement zimbabwéen, où le ZANU-PF est en minorité pour la première fois depuis l'indépendance en 1980, s'est hier fait l'écho de ces tensions. Les élus, qui commençaient leur première session depuis l'élection de mars, se sont montrés indisciplinés, se huant les uns les autres.

Mais des appels à l'unité ont été lancés. «Notre nation saigne. Le Zimbabwe appartient à tous les partis», a dit Tongai Mathuthu, du MDC. «Nous devons nous unir et réunir le peuple», a affirmé Saviour Kasukuwere, du ZANU-PF.

Le directeur de l'Institut sud-africain des Affaires internationales, Moeletsi Mbeki, frère de l'ancien président, a estimé que celui-ci «n'a pas vraiment d'influence sur Mugabe», qui est âgé de 84 ans, dont 28 passés au pouvoir.

Le gouvernement sud-africain a renouvelé sa confiance au médiateur et appelé les parties à former au plus vite leur gouvernement d'union au Zimbabwe. Mais l'Alliance démocratique (AD, opposition sud-africaine) a déclaré que «si Mbeki ne peut pas régler la crise rapidement, il doit se récuser comme médiateur».

Avec AFP, AP, Reuters, UPI, BBC, VOA, iol.co.za et news24.com