(Kaboul) Les talibans ont déclaré jeudi n’avoir « pas d’information » sur la présence en Afghanistan d’Ayman al-Zawahiri, le chef d’Al-Qaïda, dont le président américain Joe Biden a annoncé la mort par une frappe de drone à Kaboul, la capitale afghane.

La déclaration soigneusement formulée jeudi des talibans n’a ni confirmé la présence en Afghanistan ni reconnu la mort du chef d’Al-Qaïda, mais elle cite pour la première fois le nom Zawahiri depuis l’annonce lundi du président américain.

Cet assassinat est le plus grand coup porté à Al-Qaïda depuis que les forces spéciales américaines ont tué Oussama ben Laden en 2011 au Pakistan.

La présence d’Ayman al-Zawahiri à Kaboul remet en question la valeur de la promesse des talibans de ne pas héberger de groupes terroristes en Afghanistan.

« L’Émirat islamique d’Afghanistan n’a pas d’information sur l’arrivée et la présence à Kaboul d’Ayman al-Zawahiri », assure un communiqué officiel du gouvernement taliban.

Le gouvernement de Kaboul a « demandé aux services de renseignement de mener une enquête approfondie et sérieuse sur l’incident », est-il ajouté.

Introuvable depuis plus de dix ans, l’Égyptien de 71 ans était considéré comme un des cerveaux des attentats du 11 septembre 2001, qui avaient fait près de 3000 morts aux États-Unis.

 « Aucune menace »

Le président américain Joe Biden avait annoncé en direct à la télévision la mort de Zawahiri, tué dimanche matin par une frappe de drone américain à Kaboul.

Un haut responsable de l’administration américaine avait précisé que l’homme se trouvait sur le balcon d’une maison de trois étages dans la capitale afghane lorsqu’il a été visé par deux missiles Hellfire après l’aube.

La maison visée par la frappe se trouve à Sherpur, l’un des quartiers les plus huppés de Kaboul, avec plusieurs villas occupées par de hauts fonctionnaires et des commandants talibans.

 « Nous condamnons fermement une fois de plus le fait que l’Amérique ait envahi notre territoire et violé tous les principes internationaux. Si une telle action se répète, la responsabilité de toutes les conséquences incombera aux États-Unis d’Amérique », ajoute le communiqué.

Les talibans réitèrent dans leur déclaration qu’il n’y a « aucune menace » pour aucun pays depuis le sol afghan.

Le secrétaire d’État Antony Blinken avait indiqué lundi qu’en « hébergeant et en abritant » Zawahiri, les talibans ont « grossièrement violé l’accord de Doha » qui prévoyait le départ des troupes américaines d’Afghanistan.

Dans le cadre de cet accord, les talibans avaient promis de ne pas laisser l’Afghanistan redevenir une rampe de lancement au djihad international, mais selon les experts, le groupe n’a jamais rompu ses liens avec Al-Qaïda.

Vers le maintien des sanctions existantes

 « Justice a été rendue » aux familles de victimes des attentats du 11 septembre 2001, avait ajouté le président Biden lundi.

L’attaque de dimanche est la première frappe américaine connue sur une cible en Afghanistan depuis que Washington a retiré ses forces du pays le 31 août 2021, quelques jours après le retour au pouvoir des talibans.

Zawahiri était l’un des terroristes les plus recherchés au monde et les États-Unis promettaient 25 millions de dollars pour tout renseignement permettant de le retrouver. Il avait pris la tête de la nébuleuse djihadiste en 2011, après la mort d’Oussama ben Laden.

La nouvelle de sa mort survient un mois avant le premier anniversaire du retrait définitif des troupes américaines d’Afghanistan, laissant le pays aux mains de l’insurrection talibane qui a combattu les forces occidentales pendant deux décennies.

Aucun pays n’a jusqu’ici reconnu le nouveau gouvernement taliban, qui est largement revenu à l’interprétation ultra-rigoriste de l’islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir (1996-2001), et alors que le pays est plongé dans une grave crise économique et humanitaire, la communauté internationale ayant fermé les vannes de l’aide financière qui portait le pays à bout de bras depuis deux décennies.

 « Même si les talibans ne font pas face à de nouvelles sanctions, il sera plus difficile de lever celles existantes après la découverte de Zawahiri » à Kaboul, a déclaré à l’AFP l’analyste Nishank Motwani, membre de la Harvard Kennedy School.

 « En conséquence de la mort de Zawahiri […], il est probable que les fragmentations au sein des talibans vont s’amplifier, ce qui pourrait entraîner des violences internes », a-t-il ajouté.