(Stepanakert) Les combats opposant Arméniens et Azerbaïdjanais se sont intensifiés samedi sur la majeure partie du front au Haut-Karabakh, l’Arménie reconnaissant de lourdes pertes chez les séparatistes.

L’Arménie fait face « au moment peut-être le plus décisif de son histoire », a déclaré samedi, dans une allocution télévisée, son premier ministre Nikol Pachinian, évoquant le conflit au Haut-Karabakh, où des combattants soutenus par Erevan affrontent les soldats azerbaïdjanais.

Une « prière nationale pour le Haut-Karabakh et ses défenseurs » a eu lieu dans la soirée dans toutes les églises d’Arménie et de sa diaspora.

Au septième jour des hostilités dans cette région que l’Azerbaïdjan cherche à reconquérir, le ministère arménien de la Défense a assuré que les troupes séparatistes avaient repoussé une attaque massive.

Les combattants du Haut-Karabakh « ont détruit un gros regroupement militaire », a annoncé une porte-parole militaire arménienne, Chouchan Stepanian.

Mais Erevan a aussi officialisé la mort de 51 soldats supplémentaires de l’armée du Haut-Karabakh, portant le bilan officiel des affrontements à plus de 240 morts.

En outre, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), au moins 64 combattants syriens proturcs ont été tués dans ce territoire depuis le début des combats. Cette ONG affirme que 1200 Syriens qui avaient lutté contre le régime de Bachar al-Assad ont été envoyés par la Turquie se battre aux côtés des forces azerbaïdjanaises contre les séparatistes du Haut-Karabakh.

Pour sa part, l’Azerbaïdjan a annoncé avoir reconquis le village de Madaguiz, ce qui lui permet de contrôler la route reliant l’Arménie au Karabakh.  

Stepanakert, la capitale de ce territoire séparatiste survolée régulièrement par les drones azerbaïdjanais et visée vendredi par des tirs d’artillerie lourde-une première-, a connu de nouvelles explosions samedi.  

Et les sirènes des ambulances se dirigeant vers Stepanakert résonnaient dans la soirée dans les montagnes caucasiennes, selon un journaliste de l’AFP.  

En Arménie, sur la route menant d’Erevan à Goris, une localité limitrophe du Haut-Karabakh, des volontaires, simples citoyens au volant de leur véhicule, allaient en direction de la zone des combats pour évacuer vers la capitale arménienne des familles chassées par les bombardements.

« La dernière bataille »

Le Haut-Karabakh, majoritairement peuplé d’Arméniens, a fait sécession de l’Azerbaïdjan à la chute de l’URSS, entraînant une guerre au début des années 1990 qui a fait 30 000 morts. Le front est quasiment gelé depuis malgré des heurts réguliers.

Pour le président du territoire séparatiste, Arayik Haroutiounian, qui a annoncé samedi son départ sur le front pour se battre avec ses troupes, la « dernière bataille » pour le Haut-Karabakh a commencé.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev a insisté quant à lui sur le retrait des forces arméniennes des « territoires occupés ».

« Nous allons reprendre nos territoires, c’est notre droit légitime et notre objectif historique », a-t-il déclaré dans un entretien avec la chaîne de télévision Al Jazeera.  

Depuis le début des hostilités le 27 septembre, des bilans partiels communiqués font état de 242 morts : 209 soldats du Karabakh, 14 civils arméniens, et 19 civils azerbaïdjanais, Bakou ne communiquant pas ses pertes militaires.

Le bilan pourrait être bien plus lourd, Erevan assurant que 3000 soldats azerbaïdjanais sont morts et Bakou disant avoir tué 2300 militaires arméniens.  

Soutien du « peuple frère turc »

Les deux camps ont largement ignoré les appels de la communauté internationale à faire taire les armes. La Russie, les États-Unis et la France, les trois pays impliqués dans la médiation sur ce conflit sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), ont aussi réclamé un cessez-le-feu, sans succès.

Pays voisin de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, l’Iran a mis en garde samedi contre toute « intrusion » sur son territoire, après que des villages iraniens le long de la frontière ont été frappés par des tirs de mortier.

Un autre sujet d’inquiétude est le déploiement de combattants pro-turcs en provenance de Syrie en soutien des troupes azerbaïdjanaises. Ankara est un allié indéfectible de Bakou et le président turc, Recep Tayyip Erdogan, insiste lui aussi sur le départ des troupes arméniennes du Haut-Karabakh.

Samedi, Ilham Aliev a remercié M. Erdogan et le « peuple frère turc » pour leur « soutien », dans une lettre rendue publique par la présidence azerbaïdjanaise.

Bakou assure cependant qu’aucun militaire étranger ne se bat aux côtés de ses troupes. « L’Azerbaïdjan n’en a pas besoin », a affirmé samedi un vice-ministre azerbaïdjanais des Affaires étrangères Fariz Rzayev à l’agence de presse russe TASS.

Le président français Emmanuel Macron avait affirmé précédemment que 300 combattants « djihadistes » avaient quitté la Syrie pour rejoindre l’Azerbaïdjan.