Les lauréats du Nobel de la paix, le médecin congolais Denis Mukwege et la Yézidie Nadia Murad, ex-esclave des djihadistes, ont dit dimanche espérer que ce prix contribuerait à lever l'impunité des auteurs de violences sexuelles.

Le gynécologue de 63 ans et la jeune Irakienne de 25 ans vont recevoir lundi à Oslo un Nobel qui leur a été attribué conjointement début octobre pour leur lutte contre le viol en tant qu'« arme de guerre ».

« Ce prix Nobel ne fera pas disparaître les violences ni les attaques sur les femmes, les femmes enceintes, les enfants, les bébés », a déclaré Nadia Murad à la presse à la veille de la cérémonie.

« Mais notre objectif, c'est que ce prix ouvre des portes et c'est déjà le cas », a-t-elle ajouté.

Comme des milliers de femmes yézidies, Nadia Murad a été enlevée, violée, torturée et échangée par les djihadistes du groupe État islamique (EI) après leur offensive contre cette communauté kurdophone du nord de l'Irak en 2014.  

Ayant réussi à s'évader, la jeune femme - dont la mère et six frères ont été tués - se bat aujourd'hui pour que les persécutions des siens soient reconnues comme génocide.

« Aucun membre de l'État islamique n'a été traduit en justice. Ils ne sont plus en Irak mais nous voyons que les viols se poursuivent en tant qu'arme de guerre », a-t-elle souligné. « Il faut vraiment que justice soit faite à un moment ou un autre ».

Si 4300 Yézidies s'étaient échappées ou avaient été rachetées à l'EI, 2500 seraient encore « disparues », selon la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH).

Une équipe de l'ONU doit, selon son chef, commencer à enquêter sur les exactions des djihadistes en Irak début 2019.  

Denis Mukwege soigne quant à lui depuis deux décennies les victimes de violences sexuelles dans l'hôpital de Panzi qu'il a fondé à Bukavu, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), une région en proie aux violences chroniques.

« La dénonciation ne suffit plus, il est temps d'agir, a-t-il dit lors de la conférence de presse. Dans les conflits armés, [...] la transformation de corps de femmes en champ de bataille est tout simplement un acte inadmissible à notre siècle » .

 L'homme qui répare les femmes - titre d'un documentaire qui lui a été consacré - dit souhaiter que ce Nobel « ne soit pas considéré comme une victoire en soi » mais plutôt « comme le début d'un combat contre un mal qui ronge notre société : la violence faite aux femmes dans les conflits » .

Le prix consiste en une médaille d'or, un diplôme et un chèque de 9 millions de couronnes suédoises (environ 1,3 million de dollars canadiens).