C'est la question qui préoccupe le monde des médias américain depuis le congédiement inattendu de Jill Abramson, qui était devenue en septembre 2011 la première femme à être nommée rédactrice en chef du New York Times, joyau de la presse écrite aux États-Unis.

Le propriétaire du journal, Arthur Sulzberger a été sibyllin hier après-midi, se contentant d'évoquer «un problème de gérance dans la salle de rédaction». La principale intéressée n'en a pas dit davantage. Et les deux devraient s'en tenir là, ayant convenu dans une entente de départ de ne pas révéler la ou les causes du congédiemment, selon cet article publié à la une du Times.

Le même article précise cependant que le directeur de l'information du Times, Dean Baquet, était en colère contre Abramson depuis que celle-ci avait offert, sans le consulter, un poste de co-directrice de l'information à Janine Gibson, membre de la direction du journal The Guardian.

Toujours selon le même article, Sulzberger s'inquiétait en outre depuis un moment déjà d'entendre des journalistes et cadres se plaindre du style «polarisant et agressif» d'Abramson. Il l'a remplacée par Baquet, qui devient ainsi le premier rédacteur en chef afro-américain du Times.

On trouve une version plus explosive sous la plume de Ken Auletta du New Yorker. Dans cet article, Auletta raconte qu'Abramson se serait plainte d'être moins bien payée que son prédécesseur, Bill Keller. Abramson, qui a passé la majeure partie de sa carrière au Wall Street Journal, aurait même découvert qu'elle recevait un salaire moins élevé qu'un de ses adjoints mâles à l'époque où elle était directrice de l'information du Times.

Cette version est pour le moins ironique : le Times est un grand défenseur de l'équité salariale dans sa page éditoriale.

Autres pommes de discorde entre Abramson et ses supérieurs, selon Auletta : la présence de publireportages sur la page d'accueil du site du New York Times et l'intrusion présumée du côté commercial du journal dans la salle de rédaction.

La question du sexisme occupe évidemment une place importante dans cette affaire, et notamment à cause de l'utilisation fréquente du mot pushy pour décrire le style d'Abramson, un style qui est parfois perçu comme de la détermination chez les hommes.