La cascade de scandales de pédophilie touchant ces dernières semaines l'Église catholique en Europe a fait resurgir le débat sur le célibat des prêtres, une tradition séculaire que le Vatican a immédiatement refusé de remettre en cause.

La question du célibat, une exclusivité de la religion catholique parmi les religions monothéistes, imposée à une date qui divise les spécialistes, entre le IVe siècle et le concile de Trente au XVIe siècle, revient périodiquement sur le tapis. Qu'il s'agisse de faire face au déficit de vocations dans le monde occidental ou au problème de la conversion au catholicisme d'anciens prêtres anglicans mariés.

Elle a été récemment reposée par un éminent théologien opposé au pape Benoît XVI, Hans Küng, qui a proclamé, dans une tribune publiée dans les journaux de plusieurs pays européens: «Pour lutter contre la pédophilie, abolissons le célibat des prêtres».

Le célibat «est structurellement l'expression la plus frappante de la relation crispée qu'entretient la religion catholique avec la sexualité», affirme-t-il, voyant dans cette «règle» la «cause essentielle et structurelle» des abus sexuels.

Pour lui, s'il est «incontestable» que des cas de pédophilie «se produisent aussi dans des familles, des écoles, des associations et également au sein d'Eglises où la règle du célibat des prêtres n'existe pas», il relève que dans l'Eglise catholique, le phénomène est «massif».

Son point de vue a été repris notamment sur le site de laïcs catholiques «Nous sommes aussi l'Eglise».

Sans «remettre en cause (cette) règle», comme l'ont précisé ses services, le responsable de l'Eglise autrichienne, le cardinal-archevêque de Vienne, Christoph Schönborn, a cependant jugé «nécessaire» de «s'interroger sur les raisons» de ces actes de pédophilie, citant notamment le célibat.

Le cardinal a appelé à un examen sans compromis, «en appelant un chat un chat», des possibles causes de ces dérives: «Ceci inclut la question de l'éducation et de la formation des prêtres comme la question des suites de la révolution sexuelle au sein de la génération 1968. Ceci inclut le thème du célibat comme celui du développement personnel».

Une prise de position analysée par le vaticaniste Bruno Bartoloni comme un avertissement sur le fait que «la pédophilie peut refléter la frustration de prêtres qui ne sont pas à l'aise avec le célibat».

Un autre spécialiste du Vatican souligne, sous couvert d'anonymat, que l'Eglise est «consciente des difficultés affectives qu'engendre le célibat et que pour y remédier, elle encourage les prêtres à vivre en communautés».

Le Vatican a promptement réagi en réaffirmant jeudi l'importance du célibat des prêtres à la faveur d'une convention théologique organisée à Rome et intitulée «Fidélité du Christ, fidélité du prêtre».

«Le célibat sacerdotal est un don de l'Esprit Saint qui demande à être compris et vécu avec une plénitude de sentiment et de joie, dans un rapport total avec le Seigneur», a déclaré le cardinal Claudio Hummes, préfet de la Congrégation pour le clergé.

L'évêque de Ratisbonne, Gerhard Ludwig M-ller, est également monté au créneau, qualifiant, en marge de ce colloque, de «bêtise» l'hypothèse selon laquelle le célibat des prêtres serait à l'origine des actes pédophiles commis par les religieux.

L'évêché de Ratisbonne est lui-même touché par les affaires de pédophilie au sein de sa chorale, dirigée de 1964 à 1994, par le frère du pape, Georg Ratzinger.

Le pape Benoît XVI a pour sa part une nouvelle fois appelé les prêtres à vivre «de manière haute» leur sacerdoce, seul moyen de transmettre aux fidèles «le sens du péché, leur donner du courage et faire naître le désir du pardon de Dieu».