Dans un premier geste fort depuis son élection, le président russe Dmitri Medvedev a proposé lundi au premier ministre britannique Gordon Brown de tourner la page des crises bilatérales à répétition et de normaliser leurs relations.

«Il a proposé de se concentrer sur les perspectives d'un retour à la normale dans les relations (...) au niveau qui existait il y a quelques années», a expliqué le conseiller diplomatique de M. Medvedev, Sergueï Prikhodko, commentant la première rencontre entre les deux dirigeants lors du sommet du G8 à Toyako (nord).

La discussion a été «franche» et a porté sur tous les sujets qui fâchent, a-t-il précisé, alors que les relations entre Moscou et Londres se sont fortement refroidies sous la présidence de Vladimir Poutine.

Au début de l'entretien, le nouveau maître du Kremlin, élu en mars et investi en mai, a salué cette opportunité de dialogue entre Moscou et Londres tandis que M. Brown insistait sur les «contentieux» qui les opposent.

«En ce qui concerne les relations économiques et commerciales, le développement des investissements, les choses vont bien», a dit M. Medvedev. «Cela illustre le potentiel» de ces relations, a-t-il ajouté.

Cette offre de normalisation constitue la première offensive diplomatique du nouveau président russe, qui a jusqu'ici complètement marché dans les pas de son prédécesseur, même s'il apparaît plus ouvert et détendu.

De quoi y voir un premier signe d'affranchissement de M. Medvedev face à M. Poutine, devenu son tout-puissant premier ministre dans un tandem inédit à la tête de la Russie.

«Je ne crois pas qu'on puisse interpréter ces déclarations comme un signe d'indépendance de Medvedev (...) Elles sont sans doute coordonnées avec Poutine», estime Macha Lipan, experte à la fondation américaine Carnegie à Moscou.

«Les autorités russes ont dû réaliser que les mauvaises relations avec l'Occident n'apportaient pas les dividendes voulus (notamment pour les entreprises russes en Europe). Elles n'aident pas à faire avancer les intérêts nationaux russes», estime-t-elle.

Sans doute Vladimir Poutine a-t-il préféré laisser la main à son successeur pour ouvrir ce nouveau chapitre. «En choisissant un successeur jeune, plus doux, sans passé au KGB, il a voulu redresser les relations avec l'Occident», va jusqu'à avancer l'analyste.

La Grande-Bretagne paraît moins prompte à une réconciliation sans condition, notamment dans l'affaire de l'empoisonnement au polonium de l'ex-agent russe Alexandre Litvinenko, devenu un détracteur du Kremlin, en novembre 2006 à Londres.

«Nous souhaitons travailler avec la Russie (...) Mais nous n'évitons pas les sujets difficiles», a ainsi écrit le chef de la diplomatie britannique David Miliband à la veuve de la victime, Marina Litvinenko, dans une lettre rendue publique à la veille du sommet.

La Russie a refusé d'extrader le principal suspect dans cette affaire, l'ancien agent du KGB Andreï Lougovoï élu depuis député au Parlement russe, ce qui s'est conclu par des expulsions croisées de diplomates russes et britanniques à l'été 2007.

L'installation au début des années 2000 à Londres du milliardaire Boris Berezovski, bête noire du Kremlin sous la présidence de Vladimir Poutine, avait déjà envenimé les relations, Moscou réclamant en vain son extradition.

En janvier, le British Council, relais culturel de la diplomatie britannique, a été contraint de suspendre ses activités à Saint-Pétersbourg et Ekaterinbourg (Oural) sous la pression des autorités russes.

Depuis plusieurs semaines, la compagnie pétrolière russo-britannique TNK-BP est à son tour dans la tourmente, sur fond de conflit entre son actionnaire britannique - BP - et ses actionnaires russes.