Les Européens ont salué unanimement mardi l'arrestation de Radovan Karadzic mais ne semblent pas encore prêts à accélérer l'intégration de la Serbie à l'UE, soucieux de maintenir Belgrade sous pression pour arrêter l'autre grand fugitif des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic.

«Enfin! Treize ans que nous attendions ça. C'est une page qui se tourne», a déclaré le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner, dont le pays préside l'UE, à son arrivée à une réunion avec ses homologues européens à Bruxelles.

La capture de l'ex-chef politique des Serbes de Bosnie, inculpé de génocide en 1995, «est certainement une bonne chose pour le rapprochement entre la Serbie et l'UE», a-t-il ajouté. Mais «les choses se décident à 27, et on va dire +d'accord, Karadzic est arrêté, Mladic ne l'est pas+».

M. Kouchner rappelait ainsi que l'Union européenne - qui a fait de la pleine coopération de Belgrade avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPI) une condition au rapprochement avec la Serbie - attend toujours l'arrestation de l'ex-chef militaire des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic, inculpé de génocide en même temps que Karadzic et réputé beaucoup plus insaisissable.

Plusieurs ministres ont laissé entendre que la Serbie ne pouvait espérer voir immédiatement débloquer l'accord d'association et de stabilisation signé avec l'UE en avril, suspendu en attendant une «pleine coopération» de Belgrade avec le tribunal.

Cette arrestation constitue «un pas hautement significatif», a renchéri le ministre suédois des Affaires étrangères Carl Bildt. Mais «c'est UN pas, et pas forcément LE pas» décisif, a-t-il ajouté.

Les Néerlandais, dont le pays accueille le siège du TPI et qui ont toujours été particulièrement exigeants sur cette pleine coopération, ont souligné dès le début de la réunion des ministres mardi que cette arrestation ne suffisait pas à dégeler l'accord d'association.

«Il y a des États membres qui ne sont pas en état de considérer que toutes les conditions sont réunies», a indiqué une source de la présidence française, dans une allusion aux Pays-Bas.

Le ministre belge Karel De Gucht, proche des Néerlandais sur ce dossier, a lui aussi évoqué la nécessité d'arrêter Mladic.

L'interpellation de Karadzic est «un indicateur important de la volonté sérieuse du nouveau gouvernement de Belgrade de collaborer avec le TPI afin de rechercher et d'arrêter tous les suspects de crimes de guerre, y compris Ratko Mladic», a-t-il souligné dans un communiqué.

La discussion sur le dégel de cet accord, première marche vers l'adhésion à terme au bloc européen, va se poursuivre dans les prochaines semaines au niveau des ambassadeurs de l'UE, ont précisé des diplomates européens.

Face aux Belges et Néerlandais, les Italiens, partisans traditionnels d'une intégration rapide de la Serbie, devraient plaider pour le dégel immédiat de l'accord d'association.

«Il faut maintenant travailler pour arriver à une ratification immédiate de l'accord d'association», a souligné mardi leur ministre Franco Frattini.

Le diplomate en chef de l'UE Javier Solana a lui souligné que les 27 allaient maintenant consulter le procureur du TPI, le Belge Serge Brammertz.

«Je suis presque certain qu'il dira qu'il y a pleine coopération», a-t-il assuré.

Le ministre serbe des Affaires étrangères Vuk Jeremic était mardi à Bruxelles pour pousser les 27 pays à faire un geste à l'égard de son gouvernement.

Le gouvernement pro-européen formé il y a deux semaines a «prouvé hier» que «la Serbie prend très au sérieux son avenir dans l'Union européenne», a-t-il affirmé à son arrivée.