C’est le moment culturel dont tout le monde parle en ce moment. Et plutôt que de laisser languir ses admirateurs qui n’auront pas la chance de la voir sur scène, Taylor Swift amène la scène au cinéma avec le film de la tournée Eras. La Presse y a assisté, le jour de sa sortie.

Nous avions, en quelque sorte, le meilleur siège possible pour assister au concert Eras de Taylor Swift. Même ceux qui étaient dans la première rangée au SoFi Stadium, en Californie, lors des trois performances qui ont été filmées pour le film, n’ont pas eu la perspective que nous offre le long métrage. Les prises de vues aériennes, les effets spéciaux ajoutés, l’ensemble de la direction photographique, mais surtout les gros plans sur la chanteuse tout au long : le film nous donne accès à un angle exclusif et palpitant de ce spectacle, présentant des détails que même ceux dans la salle auraient peut-être manqués.

Bien sûr, nous aurions préféré être dans le stade lors de ces soirées-là plutôt qu’au visionnement du film vendredi après-midi. Mais même depuis notre siège de cinéma (sur lequel nous n’avons pas longtemps été assise, puisqu’il est bien plus agréable d’assister à un tel concert debout), ce vibrant aperçu de ce qu’est la tournée Eras nous a plutôt bien consolée de ne pas pouvoir y être en vrai.

Important tour de force technique du film : le son est capté avec brio, amenant dans la salle de cinéma l’ambiance du stade sans que les bruits ambiants ne soient dérangeants et mettant surtout les instruments et la voix de Swift de l’avant de superbe façon.

Trois heures, dix ères

Il faut d’abord savoir de ce concert de Taylor Swift, son plus grand projet à ce jour, qu’il dure un peu plus de trois heures (nous n’avons jamais assisté à un spectacle si long). Pendant trois heures, la chanteuse n’arrête (presque) jamais de chanter, de danser, de se déplacer sur l’immense scène et même de jouer comme au théâtre pour mieux illustrer ses chansons.

Il y a des décors à en perdre le compte, des jeux de lumière à en couper le souffle, des chorégraphies exécutées à la perfection, des pluies de confettis, des feux d’artifice. Demandez et vous recevrez.

Il semble que tout ce que Taylor Swift a voulu pour ce spectacle d’envergure a été exécuté. Son budget est estimé entre 10 et 20 millions, selon Forbes, et nous n’avons aucun mal à y croire.

Le film est un peu moins long que la version originale, 2 h 50 min, mais encapsule bien tous les efforts de mise en scène de la chanteuse et de son équipe. Car tant qu’à présenter dix tableaux, pour les dix « ères » que représente chacun de ses albums, autant le faire bien et en (très) grand.

La façon dont le long métrage est monté ne laisse aucun temps mort. On n’a pas de transition entre les actes et certaines chansons ont même été retirées (dont Wildest Dreams, The Archer, Cardigan), possiblement pour alléger le tout.

L’ordre de présentation des ères n’est (heureusement) pas chronologique et laisse respirer le spectacle, donne des moments explosifs, puis laisse les confettis retomber dans le calme, avant de relancer les numéros dansants. L’équilibre est le bon. Le spectacle commence avec l’ère Lover, puis suivent Fearless, Evermore, Reputation, Speak Now, Red, Folklore, 1989, des chansons-surprises tirées de son album homonyme, et finalement, Midnights, la plus récente offrande de la discographie de Taylor Swift.

Les transitions sont claires, le grand écran affiche devant nous le titre du prochain tableau, faisant chaque fois réagir dans les salles (au SoFi Stadium, comme au cinéma).

On se réjouit d’assister à une mise en scène qui surprend toujours. Swift n’hésite pas à créer des scènes théâtrales, à danser avec sa troupe, à aller aussi dans la simplicité d’un moment acoustique quand il le faut.

Mentionnons aussi que les habits de scène de la chanteuse sont tous plus époustouflants les uns que les autres. Toutes ces créations sont des pièces haute couture de Versace, Elie Saab, Roberto Cavalli, Zuhair Murad, Alberta Ferretti et Oscar de la Renta, tandis que la plupart des chaussures sont des Christian Louboutin. Tout au long du concert, les costumes de l’artiste, qui changent à chaque tableau pour s’adapter aux thématiques, mais aussi parfois pendant le même acte, font partie intégrante du spectacle.

À la hauteur

Le concert Eras permet de bien saisir l’ampleur du talent de Taylor Swift. Réfléchi comme un spectacle de Broadway avec un budget 100 fois plus gros, rien n’est laissé au hasard pour donner au public trois heures de pur divertissement, mais aussi pour marquer au fer rouge dans les esprits tout ce que l’artiste est capable d’accomplir.

Sa proposition n’est pas pour tout le monde, mais il serait de mauvaise foi de dire qu’elle n’est pas une bête de scène (sans être la meilleure danseuse, sans avoir la voix la plus impressionnante). Son charisme et sa présence scénique sont captivants. Sa façon d’interagir avec son public lui donne (presque) l’air accessible. Surtout, on constate tout le travail et l’inventivité qu’elle a insufflés à ce spectacle.

Ne vous méprenez pas. Si le film est exceptionnel, il ne satisfait pas tout à fait l’envie d’assister au concert. Au contraire, voir Taylor Swift sur grand écran nous a plutôt créé un besoin exponentiel de constater ce que ça donne en vrai, elle sur scène, nous dans les gradins d’un stade. Cette tournée (et le film qui va avec) restera dans les annales pour de nombreuses raisons.