Le prévisionniste François Trahan continue d’anticiper une récession aux États-Unis et un repli boursier important. Il parle même d’une bombe à retardement dans le marché.

« Les profits des entreprises seront à la baisse cette année et de façon prononcée durant la deuxième moitié de l’année », a-t-il dit à l’occasion d’une conférence virtuelle organisée mardi soir par des gestionnaires de portefeuille affiliés à Desjardins Gestion de patrimoine.

François Trahan explique que les titres de croissance (comme les Amazon, Meta et Nvidia) suscitent une forte demande au début d’un ralentissement économique parce que les investisseurs vont craindre les titres cycliques. « Ils se tournent donc vers des entreprises ayant une croissance plus structurelle. Ces titres tiennent le coup jusqu’au jour où ils ne parviennent plus à suivre les attentes du marché, et là, ils brisent », précise-t-il.

« On va peut-être avoir une bombe à retardement dans les marchés avant de réellement observer une réaction dans le marché et l’indice S&P 500. »

Baisse des bénéfices

Selon François Trahan, il est normal que les investisseurs pensent qu’un atterrissage en douceur de l’économie est un scénario plausible avec la fin probable des hausses des taux par la banque centrale. « On a vu ce phénomène en 2000 et en 2007-2008, mais la Fed [Réserve fédérale américaine] ne veut pas admettre qu’elle a haussé les taux plus qu’elle aurait dû et que le résultat final est une récession. Il faut donc maintenant s’attendre à une baisse des bénéfices des entreprises », a dit François Trahan mardi.

CAPTURE D’ÉCRAN

François Trahan en conversation avec le gestionnaire de portefeuille Daniel Ouellet durant l’évènement diffusé en soirée mardi

Il rappelle que ça prend presque deux ans avant qu’une hausse des taux d’intérêt ait un impact sur l’économie. Puisque la première hausse de taux a eu lieu en mars 2022, il souligne que si la relation était parfaite, le deuxième trimestre cette année serait le début du véritable ralentissement économique.

François Trahan dit s’attendre à plusieurs mois négatifs du marché de l’emploi aux États-Unis. « C’est la variable clé, car 68 % du PIB [produit intérieur brut] américain est lié à la consommation, et l’emploi est une variable critique. »

Ceux qui croient à un atterrissage en douceur pensent qu’il n’y aura pas de hausse du taux de chômage, mais la plupart des indices précurseurs de l’emploi ont déjà tourné et signalent que le chômage sera à la hausse sous peu. C’est généralement la variable qui pousse la Fed à couper les taux et qui transporte les attentes d’un atterrissage en douceur vers des craintes de récession.

François Trahan, prévisionniste

Il recommande donc aux investisseurs de se réfugier dans des secteurs jugés plus défensifs, comme le secteur de la santé (titres pharmaceutiques) et celui des services publics, où l’on trouve des entreprises ayant des revenus « plus stables ». « La vulnérabilité des titres de croissance provient de leurs multiples d’évaluation élevés », dit-il.

François Trahan participait à une conférence diffusée mardi visant à faire le point sur l’actualité économique, financière et politique. Cet évènement était organisé pour les clients du Groupe Ouellet Bolduc, une équipe de gestion de patrimoine supervisant un actif sous gestion d’environ 1,7 milliard de dollars.

Pas de recul

François Trahan avait indiqué à La Presse en septembre dernier qu’il s’attendait à ce que la Bourse chute de 35 % sur un horizon de 18 mois. Estimant qu’il n’y a aucune chance que l’économie américaine évite de tomber en récession, il disait croire que l’indice S&P 500 risquait de reculer autour des 2800 points.

L’indice S&P 500 se situait à 4275 points au moment où François Trahan avait tenu ces propos, à la fin de septembre. L’indice S&P 500 a terminé la séance de mardi à 4919 points, c’est-à-dire à un niveau 15 % supérieur à ce qu’il était à la fin de septembre.

Intronisé au Temple de la renommée des investisseurs institutionnels à titre de stratège en 2016, François Trahan avait notamment prévu en 2007 la fin de la bulle spéculative immobilière. Il dirige aujourd’hui sa propre firme, Trahan Macro Research.

François Trahan avait fait jaser il y a deux ans en disant sur le plateau d’une émission d’affaires publiques à TVA qu’il anticipait une situation « apocalyptique » pour les années 2023 et 2024.

Une « apocalypse économique » se traduit à son avis par un taux de chômage qui monte et probablement une crise financière.

Qui est François Trahan ?

Aujourd’hui résidant de Richmond, en Virginie, François Trahan possède plus de 25 ans d’expérience en finance et a été intronisé au Temple de la renommée des investisseurs institutionnels à titre de stratège en 2016.

À la tête de sa propre société – Trahan Macro Research –, il conseille une clientèle essentiellement composée d’investisseurs institutionnels.

Diplômé en économie de l’Université de Montréal, il a une approche fondée sur une compréhension des forces macroéconomiques des cycles économiques et de la manière dont les taux d’intérêt et la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine contribuent à façonner les tendances.

Au cours de sa carrière, il a travaillé pour plusieurs grandes banques d’affaires. Après avoir commencé chez BCA Research, à Montréal, il a par la suite notamment travaillé chez Bear Stearns, où il avait annoncé, en 2007, la fin de la bulle spéculative en immobilier.