Cinq adolescents de la grande région de Montréal sont soupçonnés d’avoir orchestré un stratagème ayant permis de soutirer près de 200 000 $ à au moins 150 épargnants depuis un an en faisant miroiter des rendements mirobolants.

Le plus jeune membre du groupe est âgé de 16 ans et fréquente l’école secondaire, deux ont 17 ans, alors que les deux autres viennent d’avoir 18 ans. Deux des suspects sont de Montréal. Les autres sont de Belœil, Saint-Bruno et Saint-Basile-le-Grand.

On ne peut les nommer, car ils étaient tous mineurs au moment d’une partie des faits couverts par l’enquête lancée en février par l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Ces jeunes utiliseraient des moyens qu’ils connaissent bien pour attirer leurs victimes, c’est-à-dire les médias sociaux (Facebook, Instagram, TikTok, Snapchat et Telegram).

Les suspects cibleraient une clientèle jeune, inexpérimentée et ayant peu, voire pas de connaissances financières. Ils s’abonneraient aux comptes de leurs victimes potentielles sur les réseaux sociaux et alimenteraient ensuite des échanges directs.

Les cinq présumés fraudeurs (une fille et quatre garçons) feraient des promesses de rendements prétendument « garantis » aux investisseurs en utilisant pour façade une société fictive de conseil en investissement, en l’occurrence TNO Bourse ou CBN Bourse. Les sites de ces sociétés fictives sont maintenant inaccessibles.

  • Capture d’écran du compte TikTok de TNO Bourse

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    Capture d’écran du compte TikTok de TNO Bourse

  • Capture d’écran du compte TikTok de CBN Bourse

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    Capture d’écran du compte TikTok de CBN Bourse

  • Capture d’écran du compte Instagram de CBN Bourse

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    Capture d’écran du compte Instagram de CBN Bourse

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Les jeunes seraient cependant toujours en activité et se montreraient très proactifs, selon l’AMF. C’est d’ailleurs pourquoi le gendarme boursier québécois vient de demander et d’obtenir des ordonnances de blocage à leur endroit.

Les jeunes se font passer pour des courtiers et offrent de placer l’argent de leurs victimes dans les « meilleurs investissements du moment pour leur rapporter un maximum de gain en 24 heures », est-il expliqué dans le résumé de l’enquête.

Les publications des suspects sur les réseaux sociaux affichaient des rendements garantis potentiels irréalistes comme « 500 $ = 2000 $ » à très court terme et interpellaient les gens avec des phrases comme « Tu veux investir en bourse ? Ça tombe bien je suis courtier en bourse et crypto ».

Profils fictifs et investisseurs floués

Toujours selon la preuve, les échanges sur les réseaux sociaux auraient donné lieu à des virements bancaires, notamment Interac, par les investisseurs floués.

L’enquête révèle qu’après avoir accepté, par exemple, de verser une somme initiale de 500 $, l’investisseur est sollicité pour envoyer des fonds additionnels de plusieurs centaines de dollars. Une capture d’écran d’un prétendu état de compte est ensuite fournie à l’investisseur indiquant que le solde est désormais de plus de 20 000 $.

On précise alors à l’investisseur qu’il doit payer une somme additionnelle de 4000 $ à titre de frais de service afin de récupérer son capital et ses gains. Mais même après avoir effectué ce virement bancaire supplémentaire, l’investisseur ne peut toucher les sommes promises et un virement additionnel de 2000 $ est exigé pour couvrir d’autres prétendus frais de service.

L’AMF soutient que son enquête révèle que la quasi-totalité des sommes remises par les investisseurs ne figurerait plus dans les comptes bancaires des suspects et aurait été dissimulée ou dilapidée, après qu’il en aurait été fait un usage contraire aux engagements pris auprès des investisseurs.

Les épargnants ayant fait affaire avec ces personnes de moins de 18 ans ignoraient l’identité réelle de ces dernières, puisqu’elles auraient principalement utilisé des profils fictifs pour réaliser leur stratagème.

Les suspects auraient utilisé de faux profils de femmes prétendument courtières pour convaincre des gens d’investir. Sur l’internet, les suspects auraient interagi avec les épargnants sous les noms fictifs de Rosalie Dupuis (23 ans), Justine Duffour (21 ans) et Erika Pelletier (20 ans). Leurs photos affichées sur les sites de TNO Bourse et CBN Bourse seraient celles de tierces personnes.

L’AMF pourrait aller de l’avant avec des procédures pénales dans cette affaire témoignant d’une réalité dans laquelle les jeunes baignent depuis plusieurs années : un contexte laissant miroiter des gains rapides en utilisant certains outils.

« Ce dossier est très préoccupant, car il implique des mineurs à la tête de ce qui s’apparente à un stratagème frauduleux. Notre enquête se poursuit afin de faire toute la lumière » sur cette affaire, commente le porte-parole de l’Autorité des marchés financiers, Sylvain Théberge.