En dépit de récentes avancées, beaucoup reste à faire en matière de diversité au sein des conseils d’administration et des hautes directions d’entreprises cotées en Bourse dans les principales économies du monde.

Après avoir instauré ou resserré certaines normes à ce sujet, les autorités réglementaires des marchés boursiers demeurent très partagées sur la suite de leurs efforts de promotion de la diversité à la haute direction des entreprises qui relèvent d’elles.

Peut-on s’en tenir à des normes de divulgation de situation courante et d’objectifs en matière de diversité au sein de la haute direction, et laisser les investisseurs décider de la valeur des réalisations parmi les entreprises où ils investissent ?

Ou encore, dans le but d’accélérer les progrès souhaités, devrait-on resserrer les normes mises en place ces dernières années jusqu’à l’imposition d’objectifs minimaux et obligatoires, qui devraient être atteints dans une période déterminée ?

C’est le genre de questions dont ont discuté les participants au colloque virtuel sur la diversité au sein des conseils d’administration et de la haute direction des entreprises, tenu jeudi par l’Autorité des marchés financiers du Québec.

Ce colloque virtuel était organisé dans le cadre des consultations menées dans le milieu boursier par le regroupement des Autorités canadiennes en valeurs mobilières au sujet de la promotion d’une plus grande diversité au sein des conseils d’administration et des hautes directions des entreprises à capital ouvert en Bourse.

Parmi les têtes d’affiche de ce colloque virtuel, François Dauphin, PDG de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), a présenté les résultats préliminaires d’une étude sur la première année d’application parmi les grandes entreprises canadiennes en Bourse des nouvelles exigences de divulgation en matière de diversité dans leurs conseils d’administration et leurs directions.

Pour l’essentiel, l’étude de l’IGOPP suggère une légère accélération de la hausse des pourcentages de présence de femmes et de personnes de minorités visibles au sein des conseils d’administration (qui atteignent 31,4 % et 6,1 % respectivement), ainsi que parmi les membres des hautes directions (26,3 % et 10,6 % respectivement).

« L’instauration d’une obligation de divulgation a eu des effets positifs pour faire avancer la diversité au sein des conseils d’administration et des hautes directions d’entreprises. Néanmoins, ces niveaux de diversité demeurent très inférieurs à ceux mesurés pour les mêmes groupes concernés (femmes, minorités visibles, autochtones, handicapés) dans l’ensemble de la population active », a commenté François Dauphin, de l’IGOPP.

« Il y a des avancées et une prise de conscience qui sont plus élevées que jamais et qui nous permettent d’être optimistes pour la suite. Mais il y a encore beaucoup de chemin à faire pour aller au-delà des exigences de base mises de l’avant par les autorités réglementaires », a indiqué Jimmy Jean, vice-président aux études économiques et économiste en chef du Mouvement Desjardins.

De l’avis de Kim Thomassin, première vice-présidente et cheffe des placements au Québec et de l’investissement durable à la Caisse de dépôt et placement, « le défi reste grand en matière de présence des femmes dans les conseils d’administration et les hautes directions, et il est encore plus grand en ce qui concerne l’inclusion des minorités visibles ».

Par conséquent, a-t-elle expliqué, il est très important que les investisseurs influents comme la Caisse de dépôt poursuivent leurs démarches lors des assemblées d’actionnaires et auprès des hautes directions d’entreprises afin d’élargir les normes de divulgation en matière de diversité au-delà du genre pour y inclure les minorités visibles.

« Je serais d’accord avec un tel élargissement des exigences de divulgation en matière de diversité à la haute direction d’entreprises. Toutefois, j’aurais des réserves à ce que ces exigences élargies deviennent des cibles ou des objectifs obligatoires imposés par les autorités réglementaires », a indiqué pour sa part Martine Turcotte, présidente du conseil d’IAS-Québec, section régionale de l’Institut des administrateurs de sociétés.

« À mon avis, la détermination de cibles ou d’objectifs précis en matière de diversité de haute direction doit demeurer une décision de chaque entreprise. Et c’est ensuite aux investisseurs dans ces entreprises de jauger de la valeur de ces objectifs et des efforts faits pour les atteindre, en fonction de leurs critères d’investissement. »