Lorsque l'euro faiblit et que le dollar américain s'apprécie, on assiste souvent à une augmentation considérable de l'aversion pour le risque, et les Bourses écopent. C'est que les investisseurs vendent alors les actions pour se réfugier dans la sécurité du dollar américain et des bons du Trésor. Ce phénomène, bien présent l'automne dernier, se reproduira-t-il au cours des prochains mois?

Si la victoire de François Hollande à la présidence française était attendue, les résultats des élections grecques l'étaient moins. Et elles ont relancé les interrogations quant à la fragilité de l'euro.

Bien qu'il faudra attendre les résultats définitifs et la composition du prochain gouvernement, on peut croire qu'il lui sera difficile de maintenir le plan d'austérité qui permet à l'État grec de recevoir l'aide lui permettant de faire face à sa situation budgétaire précaire.

Les deux partis qui avaient permis la mise en place du plan d'austérité, le parti Nouvelle Démocratie et le Pasok, n'ont pas acquis de majorité aux élections de dimanche.

La probabilité que la Grèce quitte la zone euro se situerait maintenant entre 50% et 75%, selon les analystes de Citigroup. Les tensions liées à l'incertitude quant à la capacité et à la volonté de la Grèce de continuer d'appartenir à la zone euro risquent fort de réapparaître.

L'euro était déjà sous pression la semaine dernière. Après cinq séances consécutives à la baisse, il a clôturé vendredi à 1,3084$US comparativement à 1,3255$US la semaine précédente. À l'ouverture des marchés hier matin, l'euro est rapidement tombé jusqu'à 1,2960$US, son plus bas niveau depuis le 25 janvier. La devise européenne a ensuite récupéré jusqu'à 1,3050$US.

En France, bien que la firme de notation Standard&Poor's se soit faite rassurante en annonçant qu'elle gardait le statu quo quant à la cote de crédit de la deuxième économie européenne, l'élection du socialiste François Hollande pourrait elle aussi peser sur l'euro au cours des prochaines semaines. Le nouveau président a été élu en promettant d'ajouter un volet croissance au traité européen sur la stabilité financière, tandis que la chancelière allemande Angela Merkel s'oppose farouchement à rouvrir le pacte budgétaire conclu l'hiver dernier.

Plus de volatilité à venir

Plusieurs stratèges sur les marchés de change, dont John Horner de la Deutsche Bank à Sydney, s'accordaient à dire hier que l'euro se dirige vers 1,25, le creux de l'année dernière.

L'incertitude sur le marché des devises risque de nouveau de se répercuter sur les Bourses. «Il faut s'attendre à plus de volatilité au cours des prochains mois. Les investisseurs manqueront de conviction pour ajouter des actifs risqués à leurs portefeuilles», dit Marco Lettieri, économiste à la Financière Banque Nationale.

Il faudra peut-être plusieurs mois avant que l'on assiste à un dénouement à la situation politique en Grèce. L'absence à court terme de solutions durables annonce beaucoup de turbulence au cours des prochains mois, explique Hendrix Vachon, économiste principal chez Desjardins. La devise européenne devrait se retrouver en dessous de 1,30 au cours des prochains jours, et pourrait y demeurer durant plusieurs semaines si aucune donnée économique favorable ne vient compenser l'incertitude politique.

Les marchés se ressaisissent, sauf en Grèce

Après une réaction initiale négative, le marché boursier français s'est bien ressaisi et l'indice CAC-40 a clôturé la séance d'hier à 3214, en hausse de 1,65%. Plus la journée avançait, plus le sentiment s'installait que le nouveau président français saura s'entendre avec le gouvernement allemand quant aux intérêts à long terme de l'Europe. Les obligations françaises s'amélioraient également. Le taux des obligations de 10 ans qui varie inversement au prix de l'obligation a baissé de 0,04%, et a clôturé à 2,78%.

Pour l'ensemble de l'Europe, l'indice Stoxx Europe 600 a gagné 0,7% après avoir été à la baisse de 0,5% en matinée. Rappelons que l'indice avait reculé de 2,4% la semaine dernière. À Francfort, la Bourse allemande a montré peu de changement.

Ce fut une tout autre histoire en Grèce. La Bourse ne s'est jamais relevée. L'indice ASE Composite a terminé la journée avec une perte de 6,7%.

Aux États-Unis, une reprise en mi-journée n'a pas permis à l'indice Dow Jones de terminer en territoire positif. Celui-ci a cédé 30 points. Les titres d'IBM et de Caterpillar pesaient principalement sur l'indice. Quant au S&P 500 et au NASDAQ, ils ont clôturé la journée à peu près inchangés.

Le prix de l'or a cédé 7$, et celui du pétrole 0,46$ à 98,03$, son plus bas niveau depuis trois mois.

Au Canada, l'indice de Toronto a résisté assez bien malgré la baisse des prix de l'or et du pétrole et a reculé de 10 points. La Bourse canadienne affiche toutefois une perte de 3,8% depuis le début du mois de mai.

Voici les objectifs économiques chiffrés du programme du président élu François Hollande, qui devront être détaillés dans un nouveau «programme de stabilité» modifié par rapport à celui adressé en avril à la Commission européenne par le gouvernement sortant: (en pourcentage du PIB)

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Les objectifs de François Hollande 

(en pourcentage du PIB)

2012 / 2013 / 2014

Croissance

0,5 / 1,7 / 2

Déficit public

4,5 / 3 / 2,3

Dette publique

88,7 / 88,6 / 87,6