La femme d’affaires Marilou est connue pour Trois fois par jour, ses recettes et ses chansons. Directrice invitée de la section Affaires, elle a confié à nos journalistes et chroniqueurs la mission de répondre à ses interrogations d’entrepreneure.

Le mot de Marilou

Quand j’ai démarré mon entreprise, j’étais dans un état créatif et très émotionnel. Ma passion et ma mission étaient plus fortes que tout le reste.

Une croissance rapide m’aura forcée à développer des qualités complémentaires à celles que j’avais instinctivement, mais reste que je reviens toujours à la grande influence qu’a ma santé émotionnelle sur mes décisions d’affaires et sur ma manière de gérer les choses. Est-ce que j’ai raison de croire que de développer nos qualités humaines est primordial en affaires ?

En affaires, on a beau être diplômé d’une prestigieuse école de commerce ou de management, certains traits de caractère, qui vont au-delà du pur potentiel intellectuel, distinguent les meilleurs entrepreneurs – qui les possèdent en tout ou en partie.

L’intelligence créative

« On appelle ça une posture créative », précise d’emblée Hélène Godin, cofondatrice de La Factry, un centre de formation qui place les sciences de la créativité au cœur de l’enseignement.

« Ça ne se limite pas juste à un état d’esprit, dit-elle, c’est une capacité de penser autrement et de faire autrement. »

Cette intelligence créative englobe plusieurs compétences de savoir-faire et de savoir-être, comme celles de s’adapter, de bien communiquer, d’avoir des capacités de résolution de problèmes, d’avoir un esprit critique et d’être capable de bien collaborer.

Selon Hélène Godin, les meilleurs gestionnaires, qu’ils soient entrepreneurs ou employés, ont développé cette intelligence créative qui leur permet de mieux gérer l’inconnu et leur donne la capacité d’imaginer des solutions nouvelles, inattendues et pertinentes.

L’intelligence émotionnelle

On la connaît tous maintenant, tellement qu’on la désigne parfois par ses petits noms : IE ou même QE, pour quotient émotionnel.

« Pour l’entrepreneur, l’intelligence émotionnelle, c’est majeur. Ça l’est pour n’importe qui qui fait des choses hors de l’ordinaire », dit Louis-Jacques Filion, professeur émérite au département d’entrepreneuriat et innovation à HEC Montréal.

Le professeur explique que dans le cas des entrepreneurs, cette capacité de bien percevoir ses émotions peut carrément être un moteur qui sera à l’origine du projet d’affaires.

« Parce qu’ils ont été en contact avec l’identification d’un besoin autour d’eux, explique-t-il, et c’est venu toucher des cordes émotives, donc l’intelligence émotionnelle. »

Le leadership

On pourrait dire qu’il s’agit de charisme, dans le sens positif du terme. « Les leaders doivent avoir un souci constant de mobiliser et d’aller chercher l’engagement de leurs troupes », dit la coach Nathalie Blain, qui estime qu’il s’agit d’une qualité que doivent indéniablement posséder les entrepreneurs.

Tout ce qui est « savoir-être » favorise le leadership, ajoute la cofondatrice de l’école La Factry Hélène Godin.

« Il faut être capable de diriger une équipe contre vents et marées », dit Mme Godin, précisant que les entrepreneurs sont habitués à la tempête.

« Un leader créatif, poursuit-elle, va avoir aussi la capacité de communiquer, de donner des rétroactions qui vont faire grandir les gens et les idées dans l’entreprise. »

La force d’attraction

Et non seulement doivent-ils être inspirants, mais les entrepreneurs doivent également savoir bien s’entourer de personnalités complémentaires, ajoute Nathalie Blain, qui travaille avec des dirigeants d’entreprise pour les aider à acquérir ce type d’habileté.

« Aujourd’hui, 80 % des entreprises sont créées par des équipes », dit Louis-Jacques Filion, de HEC Montréal, qui estime que les entrepreneurs, par leur parcours, acquièrent souvent ces compétences « douces » avant même d’approfondir une intelligence analytique.

On est dans la cour de l’intelligence créative, imaginative et émotionnelle que les entrepreneurs développent de manière plus naturelle que la moyenne des gens, explique le professeur Filion.

« Les entrepreneurs, poursuit-il, savent s’entourer de personnes qui ont des compétences distinctives des leurs, en marketing, en finances, en technologie et autres. »

L’intelligence systémique

C’est cette vision globale, ce pas de recul pas toujours facile à faire, mais qui permet de voir la forêt, et pas seulement l’arbre.

« C’est la capacité à se donner des fils conducteurs, explique Louis-Jacques Filion, du département d’entrepreneuriat et innovation de HEC Montréal. C’est autour de ces fils conducteurs, en définissant une réponse à un besoin, que les entrepreneurs trouvent des motivations très profondes pour réussir. »

Selon lui, cette faculté leur donne une vision de ce qu’ils veulent atteindre et de la place à prendre dans le marché.

La ténacité

Une grande étude de la Banque de développement du Canada (BDC) sur l’entrepreneuriat, dont les résultats ont été dévoilés plus tôt ce mois-ci, établissait différentes compétences essentielles pour les entrepreneurs. Une se distinguait en étant nécessaire à toutes les étapes de la vie de l’entreprise : la ténacité.

Beaucoup d’entrepreneurs ont eu leur grand succès après un bel échec, rappelle le professeur Louis-Jacques Filion, qui estime que souvent leur détermination fait qu’ils mènent un projet jusqu’au bout.

L’intuition

« Un entrepreneur aujourd’hui doit avoir de l’intuition et la capacité de lire l’environnement, parce que l’environnement change rapidement », soutient la coach Nathalie Blain. Regardons seulement l’horizon des planifications stratégiques, donne-t-elle en exemple : « Avant, on les faisait sur cinq ans, maintenant, on parle de planification stratégique sur trois ans, maximum. »

L’entrepreneur doit donc être souple et en contact avec cette petite voix intérieure qui peut le guider. « On en a tous, de l’intuition, dit Nathalie Blain, mais parfois, on tait cette partie intuitive pour laisser la place au rationnel, parce qu’on a peur. »

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