Les 10 élus de Québec solidaire sont devenus députés avec un coup d'éclat, mercredi. Ils ont prêté serment d'allégeance à la reine Élisabeth II derrière des portes closes pour protester contre ce « rituel archaïque ».

C'est la première fois de l'histoire de l'Assemblée nationale qu'un groupe parlementaire au complet a été assermenté en privé plutôt que dans une cérémonie publique. Les 10 élus ont juré fidélité et promis de porter « vraie allégeance à Sa Majesté la reine Élisabeth II », tel que le prévoient les règles de l'Assemblée nationale.

Les députés ont ensuite été présentés à leurs proches rassemblés au Salon rouge. Leur chef parlementaire, Manon Massé, a confirmé que cette mise en scène visait à éviter à son équipe de jurer fidélité à la souveraine en public.

« Nous l'avons fait en privé, histoire de vous épargner, chers invités, le serment d'allégeance à la reine, a dit Mme Massé aux dizaines de personnes rassemblées sur place. C'est un rituel archaïque et franchement désagréable. »

La porte-parole de QS a plus tard refusé de confirmer qu'elle portera « vraie allégeance » à la reine d'Angleterre. Elle a expliqué avoir « joué le jeu » de la prestation de serment afin de devenir députée, comme l'ont fait les neuf autres députés de son parti.

« Pour nous, c'est archaïque, a expliqué Mme Massé. Mais l'Assemblée nationale et le secrétaire général ont été clairs : vous ne le faites pas, vous ne siégez pas. Et nous, les gens nous ont élus pour siéger et ils nous ont élus pour changer les choses. »

Bien que le serment d'allégeance à la reine ait déjà été critiqué par le passé, aucun groupe parlementaire ne s'y était encore soustrait de cette manière en bloc.

« Il n'y a aucune règle qui dit que ce serment doit être fait en public, a expliqué la porte-parole de l'Assemblée nationale, Julie Champagne. Cette décision est à la discrétion d'un groupe. »

Québec solidaire compte présenter un projet de loi pour mettre fin à la pratique une fois pour toutes.

« Certains prétendent que le serment, il est impossible à changer parce qu'il est dans l'Acte d'Amérique du Nord britannique, a indiqué le nouveau député de Jean-Lesage, Sol Zanetti. Ce n'est pas exact. Il y a eu beaucoup de débats là-dessus. Il y aura débat, la partie est gagnable (...) et on va utiliser tous les recours législatifs pour faire abolir cette pratique. »

Si M. Zanetti a prêté serment en privé, c'est « parce que c'est une pratique qui n'est pas laïque du point de vue des institutions », a-t-il précisé, soulignant que la reine est la chef de l'Église anglicane.

D'autres élus solidaires ont convenu qu'ils avaient prêté serment à contrecoeur.

« Le mensonge, ce serait de dire quelque chose en public auquel on ne croit pas, a expliqué Vincent Marissal, élu dans Rosemont. Allez demander aux 74 députés de la CAQ qui se disent nationalistes comment ils se sentent de prêter allégeance à la reine, qui est quant à moi une relique d'une autre époque. »