Un cyberprédateur qui s’est fait passer pour la jeune chanteuse Laurence St-Martin sur les réseaux sociaux pour arracher des photos osées à des adolescentes a été condamné à quatre ans de pénitencier. C’est la véritable chanteuse, alertée par ses jeunes fans, qui a dénoncé le criminel aux policiers. Elle lance maintenant un appel à la sensibilisation.

« C’est tellement intense, ce qui se passe sur les réseaux sociaux ! Il ne faut jamais envoyer des photos [à des inconnus], même des photos en pantalons, puisqu’on ne sait jamais qui est derrière l’écran. C’est important que les parents jettent un coup d’œil, mais en respectant l’enfant », insiste en entrevue l’auteure-compositrice-interprète, très active sur les réseaux sociaux.

PHOTO FOURNIE PAR LES PRODUCTIONS VÉRONIQUE LABBÉ

La chanteuse Laurence St-Martin

Mark Major, 30 ans, a plaidé coupable à 10 chefs d’accusation de leurre informatique de mineur, d’extorsion et de fraude à l’identité, cet automne au palais de justice de Montréal. Il faisait alors face à pas moins de 23 chefs d’accusation. Le cyberprédateur a fait une dizaine de victimes en seulement quelques semaines au printemps 2020. Des adolescentes âgées de 12 à 16 ans de toutes les régions du Québec.

Dans l’un de ses stratagèmes, Mark Major se présentait comme Laurence St-Martin auprès de jeunes filles sur Messenger. Le succès Filles des Îles de la chanteuse de 24 ans a été vu 1,6 million de fois sur YouTube. Le cyberprédateur disait alors être en préparation d’un vidéoclip pour une nouvelle chanson et demandait des photos en maillots ou en sous-vêtements à ses victimes, selon le résumé des faits présenté par le procureur MJérôme Laflamme.

Une adolescente de 13 ans a ainsi envoyé des vidéos de nature sexuelle au cyberprédateur pour faire partie du vidéoclip et gagner 500 $, voire 1000 $. Mais quand Mark Major lui a demandé qu’elle se masturbe devant lui, l’adolescente a refusé. Elle s’est ensuite tournée vers ses parents lorsque le pédophile l’a menacée d’envoyer les vidéos à ses contacts.

Une autre ado de 13 ans a également été piégée par Mark Major en croyant discuter avec la véritable Laurence St-Martin en juin 2020. Dans l’espoir de participer à un concours de maillots de bain sur Instagram, la victime a donné son adresse au cyberprédateur, ainsi que des photos d’elle-même nue.

« Je peux faire de ta vie un enfer »

À d’autres occasions, Mark Major se faisait passer pour la directrice d’une agence de mannequinat. Le cyberprédateur réclamait alors aux adolescentes des photos en sous-vêtements. Si celles-ci n’obtempéraient pas, Mark Major menaçait de les exposer nues sur les réseaux sociaux en modifiant leurs photos de profil sur Photoshop.

« Je vais non seulement t’exposer, mais si tu n’écoutes pas ce que je demande, je vais envoyer un virus à tous tes contacts et voler tes données. En gros, je peux faire de ta vie un enfer, alors je te laisse une chance », a écrit le cyberprédateur à l’une des victimes. C’est cette adolescente qui a contacté la vraie Laurence St-Martin.

« J’ai reçu beaucoup de messages de jeunes filles. Un moment, elles ont commencé à me faire des screenshots, je me suis rendue compte que c’était vraiment de l’extorsion, il y avait de la porno juvénile ! J’ai appelé la police. Ils ont pris ça au sérieux », raconte Laurence St-Martin, en entrevue.

La jeune chanteuse, qui étudie en travail social, tient à prendre la parole pour encourager les adolescentes à la prudence sur les réseaux sociaux. Celles-ci ne doivent pas hésiter à dénoncer les pédophiles, dit-elle. « Des jeunes filles avaient peur de le dire », illustre-t-elle. D’ailleurs, Laurence St-Martin assure qu’elle ne demanderait jamais des photos de ses fans en maillot sur les réseaux sociaux.

« Des pulsions déviantes »

Mark Major a été arrêté en novembre 2020, alors qu’il était en maison de thérapie pour une dépendance à la drogue. Il était sous l’effet de speed lorsqu’il a « laissé libre recours à des pulsions déviantes », a expliqué son avocat, MHugues Surprenant.

Le juge Pierre Labelle a entériné une suggestion commune en imposant quatre ans de détention à Mark Major. Cependant, il lui reste environ 30 mois à purger en raison du temps passé en détention préventive.

« Les dossiers où on tente d’exploiter des enfants pour des infractions de nature sexuelle ont attiré dans le passé l’opprobre des tribunaux et c’est encore plus vrai, je pense particulièrement à l’infraction de leurre, les fourchettes de peine ont été revues à la hausse par la Cour d’appel », a affirmé le juge Labelle, en soulignant que le règlement du dossier avait permis d’éviter aux victimes de témoigner.