Emprisonné pour trafic de drogue aux États-Unis, le mafioso montréalais Pierino Divito vient de perdre sa bataille pour obtenir le droit de purger le reste de sa peine au Canada. L'homme de 73 ans avait obtenu l'appui d'un important organisme de défense des droits de la personne, l'Association canadienne des libertés civiles (ACLC). Mais cela n'a pas suffi.

Pierino Divito a orchestré l'une des plus importantes importations de cocaïne de l'histoire canadienne. Il a fait entrer au Canada pas moins de 5400 kg de cocaïne, dont la valeur de revente dépassait les 500 millions de dollars. Il croupit en prison pour ce crime depuis maintenant 16 ans.

Pendant qu'il purgeait sa peine au Canada, les États-Unis ont demandé son extradition pour qu'il réponde à des accusations relatives à la possession et à la distribution de 300 kg de cocaïne en Floride. Extradé en 2005, il a passé les cinq dernières années dans une cellule aux États-Unis. Sa peine prendra fin en septembre 2012.

Demande refusée

Comme la loi l'y autorise, Pierino Divito a demandé à être transféré au Canada pour y purger le reste de sa peine. Les États-Unis y ont consenti, mais Ottawa a refusé au motif que Divito représente une «menace à la sécurité du Canada». La Loi sur le transfèrement international des délinquants confère au ministre de la Sécurité publique le droit de refuser un transfert.

De leur côté, les avocats de Divito, Me Clément Monterosso et Me Marie-Hélène Giroux, ont contesté la décision du ministre devant la Cour fédérale. Cela contrevient à l'article 6 de la Charte canadienne des droits et libertés, selon lequel «tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir», ont-ils plaidé. À leurs yeux, ce refus équivaut à bannir un citoyen canadien de son pays. Un juge de la Cour fédérale a refusé de casser la décision du ministre de la Sécurité publique, mais la Cour d'appel fédérale a accepté d'entendre la cause.

C'est ici que l'ACLC est entrée en scène. Divito est la dernière victime des décisions populaires mais contre-productives du gouvernement conservateur de Stephen Harper, a plaidé l'avocat de l'important organisme, Me Lorne Waldman, l'automne dernier. En refusant son transfert dans une prison canadienne - alors que les États-Unis eux-mêmes y consentent -, Ottawa brime ses droits fondamentaux, selon l'ACLC.

Dans une décision rendue publique la semaine dernière, trois juges viennent de rejeter l'appel de M. Divito. La loi est constitutionnelle, ont-ils tranché. L'un d'eux, le juge Robert Mainville, émet toutefois une opinion divergente: il estime que la loi porte atteinte au droit de Divito d'entrer au Canada. Il suggère au ministre de la Sécurité publique d'être «sensible» à l'article 6 de la Charte lorsqu'il reçoit une demande de transfert de prisonnier.

L'avocate du trafiquant de drogue, Me Giroux, songe à porter la cause devant la Cour suprême.