Les mouettes tournent autour des bateaux de plaisance, les hôtels affichent complet et des huîtres sont servies aux tables de restaurants. Pour autant, le tourisme bat de l'aile sur le célèbre site de Matsushima depuis l'accident nucléaire de Fukushima.

Classées parmi les trois plus beaux paysages de l'archipel, les «îles aux pins» ont échappé au pire lors du tsunami géant qui a dévasté les côtes nord-est de la grande île de Honshu le 11 mars.

Les 260 îlots et les rochers saillants couvrant la baie ont atténué l'ampleur du raz-de-marée, qui n'a pas fait ici de dégâts comparables aux destructions immenses observées ailleurs sur le littoral de l'océan Pacifique.

Réduite à quelques mètres de hauteur, contre plus de 15 mètres ailleurs, la vague n'a inondé que quelques maisons et commerces, épargnant les touristes.

Mais la proximité à quelque 110 km au sud de la centrale nucléaire Fukushima Daiichi, mise en péril par le séisme et le tsunami, a stoppé le flot de visiteurs venant de Chine, de Corée du Sud et de Taïwan.

«Je ne crois pas que le tourisme pourra redécoller avant le règlement de la crise nucléaire. Les gens ont besoin d'être rassurés», explique Keiji Fukui, directeur de l'Association pour le tourisme à Matsushima.

La quantité d'émanations radioactives rejetées par les réacteurs endommagés de Fukushima a notablement diminué depuis le pic enregistré à la mi-mars, mais l'impact de cet accident nucléaire, le pire depuis celui de Tchernobyl (Ukraine) en 1986, reste considérable sur les esprits.

Les autorités et la compagnie gérant la centrale luttent toujours pour contrôler la situation. Elles espèrent atteindre un état «d'arrêt à froid» des réacteurs (température sous 100 degrés Celsius) d'ici à la fin de l'année.

«L'automne de l'an passé, de 20 à 30 bus de voyageurs asiatiques arrivaient chaque jour, ils ne sont désormais qu'une poignée par semaine», se désespère Masaharu Mano, responsable d'une entreprise organisant des visites en bateau.

Combiné à une baisse de fréquentation des visiteurs japonais, le nombre de touristes venant à Matsushima devrait passer de 3,7 millions en année normale à 2 millions en 2011 tout au plus.

Les hôtels affichent certes complet, mais près de 80% des chambres sont occupées par des travailleurs ou des bénévoles qui participent à la reconstruction des zones dévastées, selon M. Fukui.

L'industrie locale souffre aussi de la destruction des parcs ostréicoles, lesquels faisaient aussi auparavant la renommée de Matsushima. Les clients attablés aux restaurants peuvent toujours commander des huîtres, mais elles viennent du sud-ouest de Honshu.

Bien que des bouées et cordages destinés à l'élevage aient été réinstallés, il faudra au bas mot deux ans avant que les premières huîtres puissent être commercialisées.

M. Mano prévient néanmoins que rien ne sera possible tant que «les mauvaises rumeurs» liées à l'accident nucléaire n'auront pas disparu.

En attendant, le Nioh N°3, un bateau pouvant transporter jusqu'à 400 passagers, est aux trois quarts vide pour une mini-croisière.

L'Ecossaise Janice MacFarlane et sa fille, venues au Japon voir de la famille dans la région, sont les seules étrangères à bord. «J'ai regardé les informations sur la situation à Fukushima, il n'y a pas de risque à Matsushima», explique-t-elle.

Les professionnels du secteur aimeraient recevoir beaucoup de clients comme les MacFarlane, mais ils sont peu nombreux pour l'instant.