Déprogrammé pendant des années, l'Iran fait son grand retour dans les brochures des voyagistes français, le dégel géopolitique ayant mis au jour une destination rare, mais qui risque de ne pas rester confidentielle très longtemps.

«La Perse fait rêver, elle fait partie de cette demi-douzaine de destinations mythiques sur la planète», résume à l'AFP Jean-Paul Chantraine, PDG du tour-opérateur Asia, présent sur le salon professionnel du tourisme IFTM Top Résa qui s'ouvre mardi à Paris.

L'élection en 2013 du modéré Hassan Rohani avait amorcé un climat de détente, et l'accord nucléaire historique signé en juillet a ouvert la voie à une normalisation avec la communauté internationale.

«Habituellement, nous emmenions  une vingtaine de groupes, chaque année en Iran, et en 2014 nous sommes passés à plus de 50 groupes soit environ mille personnes», souligne Jean-Pierre Respaut, directeur général de Clio qui se présente comme le leader français de cette destination qu'il propose depuis une vingtaine d'années: il dit avoir «vu arriver la concurrence» récemment et parle d'une «demande exponentielle» pour 2015 et 2016.

«Les voyages reprennent», confirme Jürgen Bachmann, secrétaire général du Syndicat des tour-opérateurs (Seto): entre novembre 2014 et août 2015, un total de 919 Français ont participé à un voyage organisé en Iran par des membres du Seto (Clio n'en fait pas partie) contre 409 un an plus tôt et... 13 deux ans plus tôt.

«Villes-oasis, lacs salés, musées à ciel ouvert, déserts et sites archéologiques: c'est une destination variée et unique, hautement culturelle, raffinée et francophile», souligne William Reynaert, fondateur de Terres Lointaines, dont les clients pour l'Iran vont passer de 30 à 150 entre 2014 et 2015.

«C'est l'un de ces rares pays très évocateurs dans l'imaginaire collectif, et aussi la quinzième puissance économique mondiale. Nous misons beaucoup sur cette destination où nous pensons faire voyager environ 800 personnes en 2016» via Voyageurs du Monde et Terres d'Aventure, résume Jean-François Rial, PDG du groupe rassemblant ces deux marques.

Voile pour les femmes, pantalon pour les hommes

Les candidats au voyage ont «beaucoup d'interrogations, pas tellement sur la sécurité, mais pour savoir si on peut conduire seul, ou quelle tenue vestimentaire adopter», ajoute Alexandre Jablonski, responsable Iran chez Voyageurs du Monde.

Les voyagistes sont très stricts sur ce plan: «Les femmes doivent impérativement avoir le corps et les cheveux couverts, porter partout en public un foulard, une jupe longue, des manches longues, pas de décolleté. Les hommes ne doivent pas porter de short ou de bermuda», prévient Intermèdes.

Car en Iran «on ne joue jamais avec le feu», souligne Semra Beyazkilic, chef de produit Asie centrale de cette agence - avec qui 150 personnes sont parties en Iran en 2014, et 400 sur le seul premier semestre 2015 - qui rappelle qu'il est également interdit de photographier les bâtiments officiels ou les personnes en uniforme.

«Nous allons devoir augmenter notre programmation tellement ça marche», renchérit Pascal de Izaguirre, président de TUI France dont la marque Nouvelles Frontières a rouvert la destination fermée depuis 2009: «Les gens ne vont plus en Syrie ou au Yémen, et moins en Jordanie, on a besoin de nouvelles destinations».

Marco Vasco a lui emmené une centaine de voyageurs en Iran en 2014, et «en aura au moins le double en 2015. Ces clients ont déjà beaucoup voyagé», souligne son PDG Geoffroy de Becdelièvre.

Si un gros frein à cet engouement reste un parc hôtelier iranien restreint et vieillot, les projets d'implantation de grands groupes comme AccorHotels devraient y remédier à moyen terme.

Destination culturelle et non balnéaire, l'Iran n'attirera jamais un tourisme de masse, mais l'ensemble des tour-opérateurs lui promettent un avenir radieux sur le modèle de la Birmanie ou du Vietnam, à condition que la stabilité géopolitique reste de mise.