Sam Aliassime a mis au monde l’un des meilleurs joueurs de sa génération et peut-être de l’histoire du Canada. Sa mission est cependant loin d’être terminée.

Le père de Félix Auger-Aliassime n’a eu qu’un seul fils. En revanche, il y a quelques années, il a pris sous son aile un jeune joueur qu’il considère aujourd’hui comme son autre fils, d’une certaine manière. Ce garçon vient tout juste de remporter son premier titre chez les professionnels.

Gabriel Diallo est devenu le premier Québécois à gagner les Championnats Banque Nationale, un tournoi Challenger disputé à Granby. Des joueurs comme Vasek Pospisil et Frances Tiafoe ont déjà remporté ce tournoi par le passé.

Le Montréalais vient d’avoir 20 ans et déjà, il fait tourner les têtes. Les gens le remarquent non seulement parce qu’il mesure 6 pi 7 po, mais surtout grâce à son énergie contagieuse et le plaisir qu’il a sur le terrain.

Si Diallo connaît une telle ascension, c’est en grande partie grâce au soutien de Sam Aliassime. Ce dernier l’a remarqué dans un tournoi, lorsqu’il avait 9 ou 10 ans. À 14 ans, Aliassime s’est intéressé à lui puisque les fédérations provinciales et nationales avaient abandonné, en quelque sorte, sur son cas, par manque de résultats. Il l’a donc emmené avec lui à l’école qu’il dirige à Québec, l’Académie Aliassime, pour le former.

PHOTO SARAH-JÄDE CHAMPAGNE, ARCHIVES LA VOIX DE L’EST

Le Montréalais Gabriel Diallo a remporté les Championnats Banque Nationale à Granby, dimanche dernier.

Aliassime a même ouvert les portes de sa maison au jeune Diallo, qui a vécu chez son entraîneur pendant trois ans. Selon lui et la famille Diallo, c’était le meilleur moyen de réussir.

« Tout est dans l’éducation. Il faut être patient, bien faire les choses et ne pas sauter les étapes », a affirmé Aliassime, installé à New York pour voir fiston disputer les Internationaux des États-Unis.

Diallo est actuellement 335au monde et il évolue dans la NCAA à l’Université du Kentucky. Ce qui représente le parcours normal d’un athlète en développement. Même si Diallo est inspiré par le succès de Félix Auger-Aliassime, le père de ce dernier doit lui faire comprendre qu’il est primordial de suivre son propre chemin.

« Il faut comprendre la réalité de chaque personne. Il y a des exceptions. Je pense que dans la vie, il faut y aller avec la constance, mais il faut quand même avoir un minimum de talent et une volonté de réussir. »

Deux choses dont Diallo est doté. Sam Aliassime croit que son poulain a les mêmes qualités que son fils et que c’est avec celles-ci qu’il pourra espérer faire sa place sur le circuit de l’ATP. « Il est très calme. Il a une tête sur les épaules. Et il a un très bon entourage. »

La fierté d’un père

Si Gabriel Diallo a connu une semaine de rêve dans les Cantons-de-l’Est, Félix Auger-Aliassime, au sud de la frontière, tentera de mettre la main sur un premier titre en tournoi majeur.

L’année dernière à New York, il avait atteint la demi-finale. Avec un titre en poche, il s’est présenté à Flushing Meadows en tant que huitième joueur au classement mondial, un sommet dans sa carrière.

Son fils brille et c’est le fait qu’il soit resté lui-même qui le rend le plus fier. La célébrité et les victoires ne l’ont pas changé, et Sam Aliassime est heureux de constater que sa progéniture est parvenue à rester humble. « Félix est le même garçon que lorsqu’il avait 14 ans. Chaque année, je le vois garder ces valeurs et ça me fait chaud au cœur », a souligné le paternel.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM DE FÉLIX AUGER-ALIASSIME

Sam Aliassime avec son fils Félix

Aliassime a fait comprendre à Félix quelque chose qu’il transmet aujourd’hui à tous ses joueurs. « À 35-40 ans, les joueurs terminent leur carrière. Il restera encore une cinquantaine d’années de vie. Il faut être un bon humain. Si tout est basé sur ton succès et tes résultats, tu ne vaux rien. »

Je préfère être entouré de bons humains que de bons athlètes.

Sam Aliassime

Aliassime accorde beaucoup plus d’importance aux qualités humaines qu’aux qualités athlétiques lorsqu’il forme des jeunes. « Tu ne peux pas être un très bon joueur de tennis si tu n’es pas très bon dans la vie de tous les jours. » Sans parler de perfection, il pense qu’il faut s’appliquer dans toutes les sphères de la vie, qu’il s’agisse de bien faire son lit, de ranger ses choses ou d’aider ses parents.

Fiston a compris le message rapidement et c’est pourquoi il est un modèle de générosité et de bienveillance. « Il partage beaucoup, il aide les jeunes à l’Académie et il est même prêt à me prêter sa maison en France pour nos jeunes qui ont des tournois en Europe », a raconté Aliassime.

Un devoir de transmission

Sam Aliassime n’est pas devenu le propriétaire de son école de tennis en 2018 pour se faire plaisir. C’était plutôt pour bien encadrer de jeunes joueurs qui rêvent grand.

En arrivant dans les installations de l’Académie, il y a des pancartes sur lesquelles sont inscrites des valeurs que les jeunes doivent catégoriquement respecter s’ils veulent faire leur place : respect, combativité et plaisir. L’Académie repose sur ces trois mots et c’est en expliquant leur importance que Sam Aliassime est devenu l’un des entraîneurs les plus en vue au Canada.

« Ça commence par le respect. Apprécier le temps qu’on donne, apprécier les entraîneurs, respecter ce qu’on reçoit. L’engagement, parce que je pense qu’il ne faut pas faire les choses à moitié. Quand on entreprend quelque chose, il faut le faire très bien. Si on décide de devenir pâtissier, on va devenir un très bon pâtissier. À l’Académie, nos valeurs sont basées sur ça. »

C’est à travers l’éducation qu’on construit de bons joueurs.

Sam Aliassime

Sans oublier le plaisir, qui par-dessus tout doit dominer. « Le chemin est long, la vie est belle, il faut avoir du plaisir. Le plaisir nourrit la passion dans ce projet. »

D’ailleurs, lorsque Aliassime parle du parcours de son fils ou de celui de Gabriel Diallo, il n’emploie jamais le mot « carrière ». Il utilise le mot « projet ». Plutôt que d’entraîner les jeunes dans un métier qui pourrait leur rapporter gloire et fortune, Sam Aliassime préfère former des êtres humains. Un projet qui implique bien plus que des résultats et des trophées.