Le candidat travailliste à la mairie de Londres, Sadiq Khan, creusait son avance mercredi dans les sondages, confortant ses chances de remplacer le conservateur Boris Johnson et de devenir le premier maire musulman d'une grande capitale occidentale.

À la veille du scrutin et après une campagne marquée par les polémiques, notamment concernant la religion de M. Khan et ses fréquentations lorsqu'il était avocat des droits de l'homme, le fils d'un conducteur de bus pakistanais affichait une avance de plus de 10 points sur le candidat conservateur, le milliardaire Zac Goldsmith.

Un sondage Opinium publié mercredi par le quotidien Evening Standard lui donne ainsi 35 % des intentions de vote de première préférence, contre 26 % pour Zac Goldsmith. En comptabilisant ensuite les votes de deuxième préférence (c'est-à-dire le candidat pour lequel les électeurs se prononcent en seconde position), le candidat travailliste conforte davantage son avance avec 57 % des intentions de vote contre 43 % pour le conservateur.

Un deuxième sondage, réalisé par ComRes pour la télévision ITV et la radio LBC, donne 45 % des votes de première préférence à M. Khan contre 36 % à M. Goldsmith. Après allocation des voix de deuxième préférence, le travailliste monte à 56 % et le conservateur à 44 %.

Soucieux de voir les électeurs se déplacer dans les bureaux de vote jeudi, Sadiq Khan a toutefois appelé à la prudence, estimant que tout dépendrait du taux de participation.

Pour Tony Travers, professeur à la London School of Economics (LSE), «on ne peut pas dire que les jeux sont faits». «La plupart des gens pensent que plus il (le taux de participation) sera faible, plus ce sera positif pour Zac Goldsmith», a-t-il déclaré dans le journal Evening Standard.

La campagne a été marquée par les attaques contre Sadiq Khan du camp conservateur, qui a l'accusé d'affinités avec les extrémistes islamistes, ce qu'il a vivement dénoncé.

M. Khan a dû également prendre ses distances avec les propos jugés antisémites de certains membres du Labour, qui ont conduit à une crise dans ses rangs. Une cinquantaine de membres du parti ont été suspendus, dont une députée et l'ancien maire de Londres, Ken Livingstone, tandis que le patron du parti, Jeremy Corbyn, a décidé de lancer une enquête au niveau national.

En dehors de ces polémiques, les Londoniens se disent surtout préoccupés par la question du logement, de plus en plus inabordable, et des transports, surpeuplés alors que la capitale britannique a gagné 900 000 habitants depuis l'élection de Boris Johnson en 2008 et compte aujourd'hui 8,6 millions d'habitants.

Sadiq Khan dénonce une «campagne désespérée» des conservateurs

Sadiq Khan a dénoncé mercredi «une campagne désespérée» du camp conservateur qui a tenté d'instrumentaliser sa religion musulmane.

«Je suis déçu que les conservateurs et Zac Goldsmith (son adversaire pour la mairie, NDLR) aient décidé de mener une campagne négative, qui divise et qui est de plus en plus désespérée», a déclaré M. Khan à l'AFP lors d'une visite de campagne dans un marché du sud de Londres.

«Je vais continuer à rester positif jusqu'à la fermeture des bureaux de vote demain (jeudi) 22 h. Et espérons-le, si je gagne, je serai le maire qui unit notre ville à nouveau, qui réunit les communautés», a-t-il ajouté.

Zac Goldsmith essaie d'associer depuis des mois Sadiq Khan aux extrémistes islamistes, soulignant qu'il a par le passé partagé à de nombreuses reprises des tribunes avec certains d'entre eux. Des accusations reprises à son compte par le premier ministre David Cameron devant le Parlement mercredi matin encore.

Largement considéré comme un progressiste, M. Khan a voté pour le mariage homosexuel, ce qui lui a valu des menaces de mort. Face aux accusations des conservateurs, il a expliqué à de nombreuses reprises avoir déjà rencontré des extrémistes, mais dans le cadre de ses anciennes fonctions d'avocat spécialisé dans la défense des droits de l'homme.

«J'ai indiqué très clairement que je considérais leurs points de vue comme abjects», a-t-il déclaré la semaine dernière.

Interrogé sur la perspective de devenir le premier maire musulman d'un grande capitale occidentale, M. Khan a déclaré: «Je suis un Londonien, je suis un Britannique, je suis de confession musulmane et bien sûr je suis fier d'être musulman. J'ai des origines (...) pakistanaises. Je suis un père, un mari, un partisan de Liverpool de longue date. Je suis tout cela».