«Je ne peux pas dire que je me sens heureux, mais changé, oui.»

Quelques heures après l'écrasement mortel du vol Barcelone-Düsseldorf de la compagnie aérienne Germanwings, qui a coûté la vie à ses 150 passagers, Roberto Gomez avait toujours du mal à croire à sa chance.

Le danseur barcelonais de 32 ans, basé à Düsseldorf, était revenu dans sa ville natale pour être au chevet de sa mère. Son billet de retour pour l'Allemagne était originellement pour hier matin, 10h, dans l'Airbus 320 de Germanwings. Mais l'intervention chirurgicale de sa mère, qui souffre d'une tumeur au cerveau, a été repoussée, ce qui l'a conduit à rester sur place. C'est ce qui lui a sauvé la vie.

«Sur le coup, j'étais vraiment énervé, mais quand mes amis m'ont appelé ce matin [hier] parce qu'ils me croyaient dans le vol, j'ai réalisé à quoi j'ai échappé, a expliqué le jeune homme, en anglais. Je me sens vraiment bizarre... Je n'arrête pas de me dire que ç'aurait pu être moi.»

Assistance

Hier, dès l'annonce de l'écrasement de l'avion, dans les Hautes-Alpes françaises en fin de matinée, les proches des 42 passagers espagnols ont commencé à affluer au terminal 2 de l'aéroport El Prat de Llobregat, à Barcelone, où ils ont été reçus dans une cellule de crise montée par les autorités espagnoles et la Lufthansa, maison-mère de la compagnie aérienne à bas prix Germanwings.

«Les familles ont reçu de l'assistance. Les gens sont effondrés, évidemment. Imaginez qu'on vous appelle pour vous dire que vos proches sont morts, c'est difficile», a expliqué Ignacio Rubio del Pino, président de l'Association espagnole des usagers et des professionnels de transport.

Lors d'un bref point de presse à l'aéroport, la compagnie aérienne allemande Lufthansa a fait savoir hier qu'elle a offert son assistance aux victimes afin de les accompagner, si elles le désirent, jusqu'au lieu de l'accident.



Choc

À Barcelone, la nouvelle de l'accident aérien le plus grave en France depuis 1981 a semé une onde de choc. Ce sentiment de stupeur a été renforcé par la présence de nombreux journalistes espagnols et étrangers, qui ont afflué dans l'aéroport tout au long de l'après-midi, jusque tard dans la soirée.

En fin de journée, les familles ont été escortées de la cellule de crise vers la sortie du terminal 2, vers des hôtels de l'aéroport, et d'autres vers le stationnement. La mine basse, les yeux rougis, en état de choc, les proches des victimes sont passés, jusqu'à tard dans la soirée, d'un pas rapide sous l'oeil des caméras, encadrés de secouristes de la Croix-Rouge et de policiers.

Bébé

Employée au comptoir d'enregistrement de la compagnie Germanwings depuis trois mois, Natalia, qui préfère taire son nom de famille, a une pensée pour ses collègues du matin, qui ont procédé à l'enregistrement des passagers du vol tragique. «C'est très dur pour eux, ils ont vu tous les passagers, et même un bébé qui était à bord», a dit la jeune femme, encore secouée.

Les passagers pour le vol Barcelone-Düsseldorf prévu hier en fin de journée ont embarqué sous l'attention des médias du monde entier. «Je ne vais pas vous mentir, ça ne me rassure vraiment pas de vous parler de crash d'avion», a lâché un jeune Allemand, manifestement excédé par les questions des journalistes.

Dans la longue file d'attente du vol, d'autres passagers se sont montrés plus philosophes. «C'est une tragédie assez horrible, mais j'espère que cela n'aura pas de conséquences sur les autres vols», a indiqué Agnès Dobrzanski, une touriste australienne qui voyage entre l'Espagne et l'Allemagne. L'Espagne entame ce matin un deuil national de trois jours, à la mémoire des victimes.

PHOTO EMILIO MORENATTI, AP

Des amis et des collègues de classe des 16 élèves et deux enseignantes qui étaient à bord de l'avion pleurent leur disparition.