Des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue, hier soir à Copenhague, pour dénoncer les attaques perpétrées samedi dans la capitale danoise et exprimer leur solidarité avec les victimes.

La première ministre du pays, Helle Thorning-Schmidt, qui participait à la manifestation, a assuré que la population répondrait au drame par l'unité.

«Nous insistons pour vivre des vies libres, en sécurité dans un pays démocratique», a lancé la politicienne.

Plusieurs capitales européennes ont exprimé leur solidarité avec le Danemark.

À Paris, le premier ministre Manuel Valls a souligné que son pays et le continent ne devaient pas céder devant «l'islamo-fascisme». Madrid et Londres ont aussi affiché leur détermination.



Connu des policiers

Des détails continuaient parallèlement de filtrer relativement au profil de l'auteur de l'attaque, identifié comme étant Omar el-Hussein.

Le jeune homme de 22 ans a d'abord ouvert le feu dans un centre culturel où se tenait un débat sur la liberté d'expression, avant de s'en prendre, quelques heures plus tard, à une synagogue. Deux personnes ont été tuées et cinq, blessées.

Les autorités suédoises ont fait savoir hier que le caricaturiste Lars Vilks, qui était présent au débat, a été placé en sécurité «dans un lieu secret» par crainte d'une nouvelle attaque.

Omar el-Hussein, qui a été abattu par les autorités dans la nuit de samedi à dimanche, était né au Danemark d'immigrants d'origine palestinienne.

Un journal local rapporte qu'il était connu de la police et avait été appréhendé à quelques reprises pour possession d'armes. Il avait été condamné à deux ans de prison pour avoir agressé au couteau un homme de 19 ans en novembre 2013, et il venait de recouvrer sa liberté, il y a deux semaines.

Un haut responsable du service correctionnel, cité par la BBC, a indiqué que son comportement en prison avait été jugé suffisamment préoccupant pour justifier d'alerter les services de renseignement. Il aurait néanmoins réussi à passer sous le radar avant de commettre ses actes.

Hier, deux personnes soupçonnées de l'avoir aidé à s'armer et à se cacher ont été appréhendées.



PHOTO CLAUS BJOERN LARSEN, AFP

La première ministre Helle Thorning-Schmidt et le prince héritier Frederik (à droite) ont pris part au rassemblement.

Un profil «typique»

Lorenzo Vidino, expert en matière de sécurité et de terrorisme basé à Milan, a indiqué en entrevue que le profil d'Omar el-Hussein - passé de petit criminel à djihadiste - était «typique».

«Ce sont des personnes en mal de direction qui sont réceptives à un discours religieux radical. Il leur permet de trouver un sens à leur vie, une forme de rédemption», avance-t-il.

Le Danemark, souligne l'expert, est depuis des années à l'avant-garde de la lutte contre la radicalisation islamique et a formé nombre d'intervenants dans les services sociaux pour déceler les signes avant-coureurs.

Ses programmes n'ont cependant pas permis de déceler à temps la dérive d'Omar el-Hussein. «La triste réalité, c'est qu'on ne peut pas s'attendre à ce que les autorités réussissent à arrêter tout le monde à temps», souligne M. Vidino.

Lorne Dawson, professeur de l'Université de Waterloo qui s'intéresse également à la question de la radicalisation, pense que d'autres attaques comme celles survenues à Copenhague ou contre l'hebdomadaire Charlie Hebdo, à Paris, apparaissent inévitables dans les années à venir.

Les conditions socio-économiques difficiles qui favorisent la radicalisation de jeunes musulmans et le contexte géopolitique tendu au Moyen-Orient ne vont pas changer de sitôt et continueront d'alimenter le phénomène, note l'expert.

Chaque attaque encourage par ailleurs d'autres extrémistes à passer à l'acte. «Il n'y a pas de doute à ce sujet. De la même manière que la médiatisation des suicides fait augmenter les suicides», souligne M. Lawson.

M. Vidino, lui, ne s'attend pas à ce que le gouvernement danois change radicalement son approche en matière de lutte contre le terrorisme.

La population du pays, dit-il, a la menace bien en tête depuis le scandale des caricatures de Mahomet en 2005, et ne s'est pas laissée détourner de son mode de vie. «Ça fait partie de leur réalité depuis 10 ans», souligne l'expert.

PHOTO AP/POLICE DANOISE

Le suspect, abattu ce week-end, était connu des policiers. Il a réussi à passer sous le radar même si son cas préoccupait les autorités.