Trois juges d'instruction ont décidé d'enquêter pour déterminer si l'ancien président français Nicolas Sarkozy s'est rendu complice d'une violation du secret de l'instruction lors de la diffusion d'un communiqué par l'Élysée sur l'affaire Karachi en septembre 2011, a appris jeudi l'AFP de source judiciaire.

Des familles de victimes de l'attentat de Karachi  avaient porté plainte contre l'ancien président à la suite de ce communiqué qui affirmait que «s'agissant de l'affaire dite de Karachi, le nom du chef de l'État n'apparaît dans aucun des éléments du dossier».

Les juges sont allés contre les réquisitions du parquet qui estimait qu'il n'est pas possible de poursuivre M. Sarkozy en vertu de l'article 67 de la Constitution stipulant que le président de la République «n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité».

«À le supposer établi, le fait de permettre la divulgation d'informations issues d'une instruction en cours n'entre pas dans les fonctions du Président de la République telles qu'il les tient de la Constitution», estiment les juges Sylvia Zimmermann, Sabine Kheris et Camille Palluel dans une ordonnance consultée par l'AFP.

Le communiqué de l'Élysée, visé par la plainte des familles, avait été diffusé le 22 septembre 2011 peu après les mises en examen successives de deux proches du chef de l'État, Thierry Gaubert et Nicolas Bazire, dans le volet financier de l'affaire Karachi.

«Il n'a jamais été cité par aucun témoin ou acteur de ce dossier», relevait l'Élysée à propos du chef de l'État.

Dans l'affaire Karachi, les juges enquêtent sur un éventuel financement occulte de la campagne présidentielle d'Édouard Balladur en 1995, par le biais de rétrocommissions présumées, dans le cadre de contrats d'armement avec le Pakistan.

M. Sarkozy était en 1995 ministre du Budget et porte-parole de campagne de M. Balladur.

La justice s'interroge aussi sur un lien éventuel avec un attentat en mai 2002 à Karachi, dans lequel 15 personnes, dont 11 Français, ont été tuées. Une hypothèse est que l'arrêt à partir de 1995 du versement de commissions liées au contrat d'armement aurait déclenché des représailles et serait à l'origine de l'attentat.