Le président français François Hollande, qui avait promis de s'attaquer au cumul de mandats en arrivant au pouvoir, se heurte à la résistance d'élus de son propre camp.        

Le président du groupe parlementaire socialiste au Sénat, François Rebsamen, qui est également maire de Dijon, a fait savoir la semaine dernière qu'il n'avait aucune intention de couper court à son poste exécutif local comme le souhaite le chef d'État.

« J'ai pris un engagement devant les électeurs, j'ai été élu pour six ans, jusqu'en 2014 je serai sénateur et maire », a déclaré le politicien à la radio avant de réitérer sa position dans une entrevue au quotidien Le Monde parue lundi.

Le Parti socialiste, dit-il, se tirerait « dans le pied » s'il imposait à ses élus de renoncer au cumul de mandats alors que les élus de droite n'envisagent pas de mesures de cette nature.

M. Rebsamen a prévenu la direction de la formation et le chef du gouvernement, Jean-Marc Ayrault, qu'il ne servait à rien « de jouer les matamores » à ce sujet alors que d'autres sujets plus importants s'imposent.

Un député socialiste de Meurthe-et-Moselle, Hervé Feron, qui est maire d'une petite commune, abonde dans son sens sur son blogue. Il s'insurge contre ceux qui traitent de « cumulards » les élus détenant à la fois un mandat parlementaire et un mandat local et fustige leur « malhonnêteté intellectuelle ».

« Je n'ai rien volé pour en arriver là, je n'ai pas intrigué pour en arriver là, je ne dois rien à personne. Ce sont juste les électeurs qui m'ont élu », dit-il.

« Plafond de verre »

Le politicien s'est indigné des écrits d'une autre députée socialiste de Meurthe-et-Moselle, Chaynesse Khirouni, qui plaide dans une lettre ouverte pour le respect de la promesse de non-cumul faite par la gauche.

« Nous ne pouvons plus nous satisfaire des lacunes actuelles en terme de parité, de diversité sociale ou de renouvellement des générations qui sont la conséquence directe du cumul des mandats et des fonctions », a-t-elle souligné.

« Il est temps d'avancer à ce sujet. La France ne peut pas continuer à faire exception», ajoute en entrevue l'élue, qui voit le cumul de mandats comme un « plafond de verre » freinant l'émergence d'une classe politique plus diversifiée et plus représentative de la société française.

Selon un récent décompte du quotidien Le Monde, plus de 85 % des parlementaires ont également un ou plusieurs mandats locaux.

En 2010, le Parti socialiste avait adopté, sous la houlette de la première secrétaire Martine Aubry, une proposition, reprise par François Hollande, interdisant aux députés et aux sénateurs d'occuper en même temps un poste exécutif local.

Les candidats socialistes aux élections législatives se sont engagés à se conformer à cet engagement au plus tard trois mois après la formation d'un gouvernement socialiste. Mme Aubry a écrit aux élus du parti il y a quelques jours pour leur rappeler qu'ils avaient conséquemment jusqu'au 1er octobre pour procéder.

Après la sortie très remarquée de M. Rebsamen, Jean-Marc Ayrault a assuré que la promesse serait respectée et qu'une loi - touchant tous les élus - serait introduite à la fin de 2013.

Un porte-parole a suggéré par la suite que les élus ayant été nommés à leur fonction parlementaire avant 2010 - c'est le cas notamment du sénateur contestataire - pourraient conserver leurs fonctions jusqu'à son adoption.

La résistance des élus socialistes n'a pas échappé au site d'informations Rue89, qui vient de lancer un projet spécial pour faire pression sur les élus récalcitrants. Les citoyens sont invités à leur écrire par l'entremise des réseaux sociaux pour les pousser à agir.

« On a un devoir d'exemplarité : on dit ce qu'on fait et on fait ce qu'on dit », souligne Mme Khirouni.