La grogne sociale monte en Europe face aux mesures de rigueur prises depuis la crise de la dette, avec mercredi des dizaines de milliers de manifestants dans les rues de Bruxelles et une grève générale en Espagne notamment.

Dans la capitale de l'Union européenne, 56 000 personnes selon la police, plus de 100 000 selon les syndicats, ont défilé au son des vuvuzelas et des pétards pour dire «non à l'austérité».

La dernière grande manifestation de ce type à Bruxelles remonte à 2001, quand 80 000 personnes avaient réclamé «plus d'Europe sociale».

Aucun incident n'avait été constaté en fin d'après-midi, mais la police de Bruxelles a procédé à 218 arrestations préventives, essentiellement de personnes en possession d'objets pouvant être dangereux.

Les manifestants venaient surtout de Belgique et de France, mais aussi de Pologne, de Slovaquie ou d'Allemagne.

«Nous sommes ici pour dire au monde qu'il doit ralentir sur les économies», a indiqué à l'AFP Markus Machmik, 45 ans dont 28 de travail dans les mines, venu de la Ruhr allemande avec une centaine de collègues tous vêtus de blanc, en bottes et portant leurs casques de travail.

«Il ne faut pas ajouter à la crise financière une crise sociale sans précédent dont les salariés paieraient le prix», a dénoncé pour sa part le secrétaire général du syndicat français CGT, Bernard Thibault.

Depuis la crise de la dette, la plupart des gouvernements appliquent des mesures d'économies et des réformes difficiles comme celles des retraites pour réduire leurs déficits.

Ces mesures «vont avoir un effet désastreux sur les individus et sur l'économie», dénonce John Monks, secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats (CES) qui organisait la manifestation. «Les travailleurs sont dans les rues aujourd'hui avec un message clair pour les dirigeants de l'Europe: il est encore temps de ne pas choisir l'austérité.»

La Commission européenne a présenté justement mercredi des mesures pour punir les pays européens qui laissent trop dériver leurs finances.

«Les propositions que nous sommes en train de faire sont les meilleures pour la défense des travailleurs eux-même. Quand il faut payer les intérêts de la dette, on ne peut pas payer les politiques sociales», a fait valoir son président, José Manuel Barroso.

Mercredi était aussi une journée d'action dans plusieurs pays européens, à commencer par l'Espagne, en grève générale pour protester contre une réforme du marché du travail qui facilite les licenciements.

L'un des deux principaux syndicats du pays, l'UGT, a assuré que la grève était suivie «à plus de 70%» et par plus de 10 millions de salariés dans le pays. Mais le gouvernement s'est félicité de «l'absolue normalité» de l'activité économique.

Des heurts à Barcelone entre policiers et militants d'extrême gauche se sont soldés par une voiture de police brûlée et 23 interpellations.

Plusieurs milliers de personnes ont également manifesté mercredi à Varsovie, 4.000 à Bor en Serbie, 1.000 à Riga, quelques centaines à La Haye, Athènes et Chypre.

D'autres rassemblements étaient aussi prévus au Portugal, en Italie ou encore en Irlande, où la police a arrêté dans la matinée un homme ayant embouti l'entrée du Parlement avec un camion-bétonnière sur lequel était inscrit «Toxic Anglo Bank», en référence à la banque Anglo Irish Bank dont le renflouement sur fonds publics fait polémique.

Et les syndicats ne comptent pas en rester là.

En France, où le gouvernement a présenté mercredi un projet de budget prévoyant une réduction sans précédent des niches fiscales et sociales afin de réduire le déficit, ils ont déjà appelé à manifester à nouveau samedi contre une impopulaire réforme des retraites.