Malgré les critiques persistantes sur sa politique de sécurité, Nicolas Sarkozy a confirmé lundi sa volonté d'appliquer la déchéance de nationalité aux Français naturalisés meurtriers de policiers et gendarmes, notamment, mais a renoncé à l'étendre aux faits de polygamie.

Après plusieurs jours de débats sur la place publique au sein même de son gouvernement, le président français a tranché ce dossier sensible au cours d'une réunion avec son premier ministre François Fillon et les principaux ministres concernés.

Il a arbitré en faveur de la ligne défendue par le titulaire du portefeuille de l'Immigration, Eric Besson, moins dure que celle du ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux.

Comme M. Sarkozy l'avait annoncé dans un discours à Grenoble le 30 juillet, la possibilité de déchoir de leur nationalité les Français naturalisés depuis moins de dix ans sera strictement limitée «à ceux qui portent atteinte à la vie d'une personne dépositaire d'une autorité publique, en particulier les policiers et les gendarmes».

Exit donc la proposition de M. Hortefeux qui souhaitait pouvoir priver de leur nationalité les coupables de «polygamie de fait» et de fraude aux prestations sociales. Mais Nicolas Sarkozy a annoncé lundi un renforcement des «sanctions pour fraude aux prestations sociales» prévues par la loi.

L'association SOS Racisme a aussitôt dénoncé «l'arbitrage de la honte» du chef de l'État accusé de créer «une distinction entre des Français qui seraient légitimes et d'autres qui ne le seraient pas».

Après la réunion de lundi, la présidence de la République a tenu à souligner que les nouvelles modalités de déchéance de la nationalité, limitée dans les faits depuis 1998 aux seuls coupables de terrorisme, avaient été élaborées «dans le respect scrupuleux des principes républicains, de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du droit européen».

La déchéance de nationalité pour les meurtriers de policiers est l'un des deux volets principaux du renforcement du dispositif sécuritaire décrété au coeur de l'été par le président français, avec les expulsions très controversées de Roms vers la Roumanie et la Bulgarie.

Depuis la fin juillet, le discours sécuritaire musclé de M. Sarkozy a alimenté la polémique, suscitant de violentes réactions d'indignation, à gauche comme dans les rangs de la majorité.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont défilé samedi dans toute la France contre la politique sécuritaire du gouvernement.

Malgré ces critiques, le président a décidé lundi de maintenir le cap et de compléter les textes qui sont ou seront soumis à l'examen du parlement.

À commencer par une réforme de la loi sur l'immigration -attendue fin septembre- afin de «faciliter la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière», y compris les ressortissants de l'Union européenne.

Allusion directe aux expulsions de Roms, ce texte facilitera les reconduites de citoyens européens «en cas de menace pour l'ordre public, en l'absence durable de moyen de subsistance ou d'abus du droit à la libre circulation», a indiqué la présidence française.

Le chef de l'État a également souhaité une «mission d'expertise» pour «examiner les conditions d'une extension de la procédure d'opposition à l'acquisition de la nationalité aux mineurs condamnés à de la prison».

En France, le «droit du sol» permet l'acquisition de la nationalité aux jeunes nés en France, de parents étrangers, s'ils en font la demande.

La présidence souhaite que ces mesures soient appliquées «avant la fin 2010».