Le camp de Nicolas Sarkozy estimait mardi avoir marqué des points importants dans le duel politico-judiciaire qu'il livre à l'ancien premier ministre Dominique de Villepin dans le procès Clearstream, après le témoignage de l'ancien maître espion, Philippe Rondot.

Ce témoignage apparaît, pour l'instant, comme l'un des moments clés à mi-parcours d'un procès qui doit s'achever le 23 octobre. Jusqu'à présent, Dominique de Villepin, accusé d'avoir trempé dans une machination pour déstabiliser Nicolas Sarkozy avant l'élection présidentielle de 2007 avait montré beaucoup d'assurance dans l'affirmation de son innocence, et avait même pu profiter de quelques erreurs du camp présidentiel.

«Le général Rondot avait réussi ses écrits et hier il a réussi son oral», s'est félicité mardi Me Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, au lendemain du témoignage du militaire qui a contredit la version de l'ex-premier ministre à plusieurs reprises.

Alors que le général a «déposé sous serment», a souligné l'avocat sur la radio Europe 1, Dominique de Villepin est «un prévenu comme les autres et à ce titre il a le droit de nier et de mentir».

«J'ai noté qu'hier soir contrairement à son habitude il ne s'était pas précipité vers les forêts de micros et de caméras et qu'il avait préféré partir par une porte dérobée», a encore relevé l'avocat qui représente Nicolas Sarkozy sur le banc des victimes de cette affaire.

Au premier jour du procès, le 21 septembre, Dominique de Villepin s'était présenté devant les journalistes: «Je sortirai libre et blanchi au nom du peuple français», avait-il lancé solennellement, dénonçant l'«acharnement» de Nicolas Sarkozy contre lui.

Si la déposition du général Rondot n'établit pas que Dominique de Villepin a participé à la manipulation qui a consisté à inscrire le nom de personnalités, dont celui de Nicolas Sarkozy, sur des listings bancaires afin de les discréditer en faisant croire qu'ils détenaient des comptes occultes, elle fragilise toutefois sa position.

L'ancien agent des services de renseignement, chargé en 2003-2004 d'enquêter sur l'affaire Clearstream, a en particulier affirmé que le nom de Nicolas Sarkozy avait été cité plusieurs fois en janvier 2004 lors d'une réunion consacrée à ces listings avec Dominique de Villepin. Ce que nie ce dernier.

Depuis le début du procès, l'ex-premier ministre et ennemi de Nicolas Sarkozy tient bon, répondant pied à pied à toutes les accusations portées contre lui. Il a en particulier passé sans encombre son interrogatoire par le tribunal.

Ses contradicteurs et co-accusés, Jean-Louis Gergorin, ancien vice-président d'EADS, et Imad Lahoud, mathématicien et faussaire présumé des listings, sont jusque-là apparus peu crédibles: le premier se disant lui-même «obsédé des complots», le deuxième étant qualifié de «menteur» par l'accusation.

Dominique de Villepin, qui joue son avenir politique dans ce procès, a également su tirer parti d'un lapsus apparent de Nicolas Sarkozy. Interrogé depuis New York sur les grandes chaînes de télévision, le 23 septembre, le président français avait qualifié de «coupables» les inculpés du procès Clearstream, une atteinte à la «présomption d'innocence», principe de base du droit français.

Mardi, c'était au tour d'un célèbre juge financier Renaud van Ruymbeke, destinataire des fichiers falsifiés de l'affaire Clearstream, de témoigner devant le tribunal correctionnel de Paris.